Seth Troxler au festival Movement à Détroit – © DJ Pionner – provenant du documentaire « We Become One »

Depuis quelques années, AlphaTheta (la maison mère de Pioneer DJ) s’emploie à documenter la culture électronique sous un angle différent : plus réflexif, plus curieux. Avec We Become One, leur troisième long format, ils posent une question simple et presque universelle : pourquoi la musique nous connecte-t-elle autant ?

Le documentaire s’ouvre comme une interrogation post-fête : qu’est-ce qui se joue vraiment quand on danse ensemble ? Pourquoi une même boucle peut faire vibrer des inconnus venus d’horizons très différents ? Pour y répondre, la DJ et productrice Kikelomo Oludemi embarque pour un voyage entre clubs, studios et labos de recherche. De Detroit à Accra, en passant par Berlin, Londres, Lille ou encore Johannesburg.

Illustration pour Moodyman with Kike2

Kikelomo & Moodymann à Détroit | © DJ Pioneer – provenant du documentaire « We Become One »

Là où We Become One se distingue, c’est en allant chercher des réponses du côté des neurosciences.
Daniel Levitin, neuroscientifique et ancien producteur, explique comment le cerveau réagit aux rythmes : activation de circuits électriques, libération d’hormones, état de “flow” — cette sensation de perdre la notion du temps et de soi. Julia C. Basso, de l’Embodied Brain Lab, parle de « synchronisation inter-cérébrale » : quand on danse ensemble, certaines zones de nos cerveaux s’activent ensemble. C’est biologique, pas juste symbolique.

Le documentaire présente aussi l’Alpha Wave Experience, imaginée par Dan Ghenacia à Lille : une installation lumineuse et sonore qui plonge le cerveau dans des états méditatifs, mesurés par EEG (électroencéphalogramme )qui permet de mesurer et d’enregistrer l’activité électrique du cerveau. Une façon de matérialiser ce que beaucoup vivent sur le dancefloor sans pouvoir l’expliquer.

Si le film célèbre la puissance de la musique partagée, il souligne aussi un paradoxe cruel : les lieux qui rendent cela possible ferment à un rythme inquiétant. Au Royaume-Uni, 65 clubs ont fermé entre décembre 2023 et juin 2024. Kikelomo insiste : un club, ce n’est pas juste un espace festif, c’est un refuge pour beaucoup — personnes LGBTQIA+, racisées, jeunes en quête de lien. Elle cite Berlin comme exemple : là-bas, les clubs sont protégés au même titre que les musées ou les opéras.

We Become One ne cherche pas à enjoliver la fête. Il montre, sans pathos, ce que produit une expérience musicale partagée : du lien, de la reconnaissance mutuelle et parfois même de la réparation. En combinant paroles d’artistes, regards scientifiques et ancrage social, le film pose une question claire : et si la culture club valait plus qu’on ne veut bien le croire ?

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