L’organisation caritative britannique Help Musicians vient de publier un rapport alarmant sur la situation financière et psychologique des musiciens dans le pays.
C’est l’une des nombreuses conséquences de la pandémie mondiale de Covid-19 qui sévit dans le monde depuis maintenant plus de deux ans, et la musique n’est pas épargnée. En France, le gouvernement vient d’annoncer de nouvelles restrictions, notamment le retour de l’obligation du port du masque dans les lieux fermés (dont les clubs, bars et salles de concert). À Berlin, les clubs repassent à 50 % de leur jauge, et en Angleterre, l’industrie musicale dresse un triste constat : selon l’organisation caritative Help Musicians (via la BBC), un tiers des musiciens britanniques n’a toujours rien gagné depuis la levée des restrictions en juillet 2021, et 83 % d’entre eux ne parviennent toujours pas à trouver un emploi régulier. Ce constat découle d’une enquête menée en août dernier auprès de 929 musiciens. À noter que parmi les artistes qui, eux, ont gagné de l’argent, 90 % d’entre eux ont touché moins de 1000 £ par mois (soit 1180 euros) et que 22 % envisageraient d’abandonner totalement la musique.
À lire également
Clubs, bars, salles de concert : le “contraignant” retour du port du masque obligatoire
Des chiffres éloquents qui prouvent la difficile reconstruction de l’industrie musicale dans le pays, alors que les salles de concerts et clubs ont été fermés pendant la majeure partie de la pandémie (18 mois) et que l’ombre de nouvelles restrictions plane suite à l’arrivée d’une cinquième vague en Europe. Une situation catastrophique mais peu étonnante quand on sait qu’en 2020, 69 000 emplois avaient disparus dans le secteur musical en Grande-Bretagne, selon une autre étude réalisée par UK Music, l’organisation qui représente les intérêts collectifs de l’industrie musicale du Royaume-Uni.
Sur le plan de la santé mentale des musiciens, le constat est tout aussi alarmant : Help Musicians a indiqué une augmentation de 60 % des sollicitations pour un soutien psychologique, et constate qu’un musicien sur huit est confronté à un problème de santé mentale qui l’empêche de reprendre son travail.
L’État et les plateformes de streaming mis en cause
En octobre 2020, le gouvernement avait débloqué une aide de 257 000 millions de livres pour plus de 1300 organisations culturelles. Mais les travailleurs indépendants, dont les musiciens, n’avaient pas eu le droit d’en bénéficier. « Le fait que l’aide financière offerte par le gouvernement ait laissé tant de personnes sur le carreau ont entraîné une énorme perte d’emplois et de talents », avait déclaré Horace Trubridge, secrétaire général de Musicians’ Union à Konbini.
À lire également
Streaming : ce que les artistes gagnent est “pitoyable”
Une crise qui s’ajoute aux difficultés rencontrées par les artistes pour leurs tournées européennes à la suite du Brexit, notamment l’obtention de visas. Les musiciens pointent également du doigt les redevances de la part des plateformes qui se basent pour la plupart sur un modèle économique qui ne favorise pas les artistes. Et 30 000 d’entre eux ont déjà manifesté leur colère à ce propos. James Brown, guitariste du groupe de rock Pulled Apart By Horses, a récemment déclaré à la BBC : « Il faut du temps pour que les redevances arrivent. Elles peuvent prendre des mois, voire des années. Donc le retard pris par les musiciens pour pouvoir gagner un bon salaire stable grâce à la musique a ralenti jusqu’à s’arrêter« . En novembre 2020, dans un rapport demandé par le parlement anglais, Will Page, ancien économiste en chef de Spotify, avait déclaré : « Tout le monde profite de la reprise du streaming, mais certains plus que d’autres – avec les artistes et les auteurs-compositeurs qui se sentent lésés« .
Pour tenter de sauver les meubles, UK Music a présenté au gouvernement en octobre dernier un plan de relance qui prévoit notamment des allégements fiscaux, une facilitation des déplacements des artistes au sein de l’Union Européenne et une réduction de la TVA sur les tickets de concert. Des mesures que la secrétaire d’État à la Culture, Nadine Dorries, s’est engagée à mettre en place. Un premier pas vers l’amélioration d’une situation qui devient critique.