Tsugi parie sur Les Gordon
Dans les années 50, les époux Gordon sortaient une série de romans policiers sur le FBI, avec un héros incarnant parfaitement la figure américaine, John Ripley, qu’ils propulseront même sur le grand écran avec un film encore une fois écrit à quatre mains. Mais notre Gordon à nous, ou plutôt devrions-nous dire notre « Les Gordon« , est seul aux manettes de ses récits sonores, et son Amérique à lui, c’est l’Armorique.
Repéré dans un premier temps par le tremplin Inrocks Lab, Marc a fait ses premières gammes l’année dernières aux Trans Musicales de Rennes, sa ville, en passant juste avant un certain Stromae. Depuis, il a sorti une pléthore de titres et d’EPs, et s’est retrouvé à juste titre sur la dernière compilation Seriously, Eric ? d’Alter-K. Son titre « Pléthore » nous a alors frappé directement, et paradoxalement avec une extrême douceur, dans le coeur. En fait, c’est le genre de titre dont on ne se remet pas, ou du moins dont on ne voudrait jamais se remettre.
Bien sûr, à l’écoute de certains gimmicks vocaux et de certaines textures, on pourrait aisément ranger le beatmaker dans une case où se trouvent déjà quelques Superpoze, Fakear ou Thylacine, et dont l’avenir doré n’est plus tellement à prédire. Sauf que l’électro de Les Gordon flirte avec toute une flopée d’arrangements et de sonorités (mandoline, ukulélé, flûte, violoncelle) qui l’attirent tour à tour vers une pop funambulesque et protéiforme (« Matisse »), dans un club suintant et aux rayons lasers azimutés (« Altercation »), ou vers un piano gracile, aux notes de velours (« Décision »).
Son dernier EP, Saisons, est sorti il y a une dizaine de jours, et il n’est certainement pas de saison : vous y trouverez du soleil conjugué à tous les temps, avec l’exotique « Matisse », la tendre « Isolée » ou la brûlante « Twin ».