Trois questions à Kai Alcé, le vétéran house qui a ramené la fête à Atlanta
Souvenez-vous, il y a quelques semaines, Tsugi se prenait pour une agence de voyage et faisait gagner un week-end en Croatie pour assister au festival du label anglais Defected – maison house de Dimitri From Paris, NOIR et Sandy Rivera, entre autres. Aujourd’hui, le gagnant a gagné, il doit être très content, mais il est grand temps d’oublier le lieu incroyable du festival (soleil, plage, mer turquoise, vous voyez le principe) pour peut-être se concentrer sur ce qu’on ira y voir ! Car Defected Croatia a beau épater par son côté « vacances de rêves », n’oublions pas le sérieux et le goût du label derrière tout ça. Ainsi, du 11 au 15 août seront attendus Basement Jaxx, Julio Bashmore, Dennis Ferrer, Kenny Dope, Riva Starr, Nightmares On Wax ou encore Kai Alcé, natif de New-York, vétéran de Detroit et depuis installé à Atlanta.
Ce n’est pas tous les jours que l’on tombe sur un DJ et producteur à la carrière aussi cohérente, indefectible, et longue que celle de Kai Alcé, l’Américain arpentant les dancefloors depuis plus de vingt ans avec ses reconnaissables grosses lunettes de couleurs vives. Récemment, il a signé un remix d’Infinity Ink, son premier EP The Kaiser (il gardera ce surnom) sorti en 2002 n’a pas pris une ride et sa collaboration avec Omar S sur le deux-titres Jive Time est un classique à ne pas négliger. Et surtout, il est en partie responsable du fait qu’on ne s’ennuie pas la nuit Atlanta, ayant apporté un peu de Detroit dans ses valises – si d’aventure vous vous retrouvez en Georgie un vendredi soir, ne loupez pas ses soirées « Distinctive » où l’on a pu croiser Moodymann, Karizma, Larry Heard, Kyle Hall, Theo Parrish ou encore Omar S. On n’a pas pu résister : on lui a posé trois questions en attendant de retrouver notre crème solaire et la chaleur croate.
Tu es invité par le label Defected à jouer le 12 août sur sa « Beach Stage ». As-tu déjà sorti des morceaux chez eux, sachant que tu as déjà ton propre label ?
Je n’ai jamais eu de « vraie » sortie chez eux, uniquement des remixes. C’est une relation qui grandit avec le temps. Mais je peux très bien sortir des choses sur d’autres labels que le mien. Ce que je fais d’habitude est plus instrumental et deep, ce qui n’est pas forcément quelque chose que je sortirais sur Defected, mais j’ai d’autres projets sur lesquels je travaille en ce moment, avec des vocaux. Je n’écarte pas la possibilité en tout cas !
Vas-tu adapter ton mix au style Defected ?
Ils m’ont toujours laissé faire tout ce que je voulais ! Je suis en train de travailler sur le mix du festival (Defected In The House Croatia, un triple album attendu pour le 15 juillet sur lequel Kai Alcé, Crookers et Dario D’Attis dévoilent un mix, ndlr). Ce n’est pas comme un podcast, là les gens vont garder ce CD pendant quelques temps, j’avais envie de montrer ce que je suis musicalement. C’est difficile de faire ça en 80 minutes ! Mais pour le festival, je vais emmener une jolie sélection avec moi, et vu que j’imagine qu’il fera bon et qu’on sera dehors, je pense que je vais tout simplement passer de la musique qui fait du bien au soleil.
Ton label, NDATL, s’appelle ainsi pour évoquer les trois villes où tu as vécu : New York, Detroit et Atlanta. Quelles sont les influences de ces villes dans la construction de ton style ?
J’ai passé les dix premières années de ma vie à New York, les dix ou douze suivantes à Detroit, et depuis je suis à Atlanta. J’ai grandi à New York l’époque du disco et des débuts du hip-hop – à la maison, on écoutait surtout du disco, mais pas de hip-hop, car en ce temps-là le hip-hop ce n’était que pour les gosses, pas pour les parents ! Quand j’ai déménagé à Detroit, la house et la techno étaient en train de naître, c’est là-bas que j’ai appris à mixer. Et j’ai ramené toutes ses influences à Atlanta quand j’ai commencé mes études à l’Historically Black College de Georgie (les HBCs sont des universités privilégiant les inscriptions d’Afro-Américains mais ouverts à tous, ndlr.). Hip-hop, house, techno… Je me suis nourri de tout ça. Je n’ai jamais été vraiment tenté de revenir à Detroit, j’ai préféré créer quelque chose ici. Par exemple j’ai rapidement commencé à organiser des fêtes en invitant des mecs de Detroit comme Chez Damier, que j’avais rencontré là-bas. J’ai aussi joué dans beaucoup de clubs du coin. Et puis j’ai créé mon label car je ne voulais pas devoir convaincre des gens que j’en valais la peine, expliquer pourquoi je devais être signé… Si je sens que ma musique est assez bonne, je prends sur mon propre temps et sur mon propre argent et je la sors.