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8 octobre 2018

Simo Cell remet le dancehall au goût du jour avec un nouvel EP sur BFDM

par Dylan Leport

Cela fait quelques temps déjà que Simo Cell s’affirme comme l’un des DJs et producteurs les plus novateurs de la scène électronique française. Pour autant, le son qui le caractérise n’a pas grand-chose de frenchy. Plus influencé par ce qu’il se passe outre Atlantique, et à Bristol tout particulièrement, il devient en 2016 le premier Français à signer sur Livity Sound, le label de Peverelist. Aujourd’hui, sa discographie accueille un nouvel EP plus singulier sur le label BFDM, où des rythmiques jamaïcaines s’entrechoquent avec des inspirations d’une autre décennie. Un dancehall futuriste qui vient pourtant de ses années collège : décryptage. 

Avec ce nouvel EP orienté dancehall, tu ajoutes une nouvelle corde à ton arc, d’où ça t’est venu ?

Ça fait un an ou deux que je suis tombé là-dedans. J’ai pris une grosse claque avec Bird Sound Power, le premier album du groupe Equiknoxx. Je trouvais ça génial, mais je ne me voyais pas intégrer ce type de musique dans mes sets. C’est quand j’ai entendu certains DJs en jouer que ça a fait tilt, je me suis rendu compte que c’était une musique finalement très club.

Face à ces rythmes ralentis, comment réagit le public ?

C’est quitte ou double. Déjà, ça dépend beaucoup de la manière dont c’est amené. C’est vrai que c’est lent, donc il faut prendre ses repères et s’habituer à changer de tempo, mais il y a des techniques pour ça. L’idée c’est de faire oublier au public que le rythme a changé. Après, il y a des villes où ça cartonne, et d’autres où tu joues un morceau, puis tu te ravises parce que ça ne prend pas… Globalement, il y a  quand même un emballement autour de ces styles. Que ce soit pour le dancehall qu’on met en avant avec Low Jack et Judaah via BFDM, plutôt sur le versent UK, bass music, dub, que dans d’autres registres défendus par exemple par Lena Willikens ou le crew du Salon des Amateurs – qui jouent des trucs lents, plus EBM. Il y a un engouement pour le downtempo en général, mais le dancehall a peut-être un statut un peu particulier car il a été énormément revisité dans la musique mainstream sans que l’on s’en rende vraiment compte. D’abord dans la musique des années 2000 avec Timbaland, Missy Elliott, Sean Paul, etc, et encore davantage au cours de ces cinq dernières années. Inconsciemment, on est influencé par ce qu’on entend partout à la radio. C’est différent du dancehall à l’ancienne, mais les instrus de Rihanna viennent très souvent de là par exemple. Même le plus gros tube d’Ed Sheeran, c’est une rythmique dancehall. C’est très actuel au final !

N’y a-t-il pas une dimension second degré dans tout ça ?

Carrément ! Il y a un coté hyper cheesy, mais je crois que dans la musique et dans l’art en général, tout marche par cycle. On sort d’une phase où il y a eu un regain d’intérêt pour l’underground, le coté un peu sérieux de la techno, alors il est possible qu’il y ait une certaine opposition à ça, une espèce de pied de nez un peu marrant. Ça fait du bien de déconner un peu. Quand on joue avec Judaah ou Low Jack et qu’on balance la « Gasolina » par exemple, c’est sur qu’il y a un côté un peu troll ! (rires)

Justement, comment on en arrive à jouer ce genre de morceau en dehors d’un set à la maison ou entre potes ?

J’écoutais énormément la radio au collège. Les années 2000 m’ont vraiment beaucoup nourri. Du coup il m’arrive de retomber sur des vieux trucs de Sean Paul ou Nina Sky, et finalement on est tous obligés de reconnaître que ça défonce ! Sean Paul était un des plus gros vendeurs et ambianceurs à l’époque, je pars du principe qu’il ne faut pas bouder son plaisir. Ça prenait super bien cet été en particulier. Il y a le coté estival évidemment, mais aussi le coté « souvenir » qui crée une ambiance vraiment cool, ça fait sourire et danser à la fois, c’est tout ce qui compte.

Il y a un an ou deux, tu disais t’épanouir pleinement autour de 140 bpm, où en es-tu vis-à-vis de ça ?

Ça commence à faire un bon moment que je mixe, alors aujourd’hui je n’ai plus vraiment de limite là-dessus. Il y a vraiment plein de trucs qui m’intéressent un peu partout, du coup on va dire que je joue de 80 à 160. Je peux rester fixe, monter, descendre, dédoubler… C’est vaste. J’ai une résidence à Nantes dans un lieu qui s’appelle le Trempolino. Environ une fois par trimestre, j’y organise une teuf de 17h à 2h, c’est l’occasion de se risquer à des choses nouvelles et quand tu joues vraiment au feeling, tu restes pas à 140 !

Justement, peux-tu vous expliquer un peu le concept de cette résidence ?

Le Trempolino, c’est une institution culturelle à Nantes, qui propose de la location de studios, des cours de musique, etc… À la base ils sont plus axés sur le rock, et grossièrement, sur toute la scène indé. Le nouveau directeur souhaitait garder cet esprit-là, mais voulait aussi s’ouvrir à la musique électronique. Il m’a donc proposé d’avoir une résidence où j’aurais carte blanche. On est dans le building où sont les studios, on transforme le bar du rez-de-chaussée en club, et ça devient un spot éphémère qui apporte un peu de sang frais sur la scène nantaise. J’invite un nouvel artiste à chaque fois ; pour l’instant il y a eu Batu, Bambounou et Low Jack. On joue en back-to-back pendant les neuf heures, et généralement dès 21h, c’est le feu. Du coup à partir de là on joue de la musique de peak time, et à 2h t’as l’impression qu’il en est six, c’est assez marrant. Pour être honnête, je ne pensais pas que ça prendrait autant, mais bon, ça confirme que Nantes est une ville qui bouge bien et où les gens sont chauds !

Et les studios, vous les utilisez ?

On a justement passé trois jours dedans avec Low Jack. Quand les agendas coïncident, on passe une petite semaine ensemble, ça nous permet de se forcer à faire du son parce que même si on habite à deux stations de métro, on fait jamais ça. Ça permet d’être dans des conditions optimales et de vraiment s’impliquer. On en a sorti plusieurs boucles, il faut qu’on termine tout ça mais on est plutôt contents. On ne voulait pas faire de dancehall cette fois-ci, on est plutôt partis vers des trucs un peu grime, trap… Peut-être qu’on va faire poser des gars dessus, on verra.

Un dernier mot sur ton EP 5 party mix ?

C’est peut-être pas super flagrant à la première écoute, mais c’est un EP très influencé par toute la musique club US des années 2000. « BalandBeat » c’est un morceau très Timbaland, il y a beaucoup d’éléments qui rappellent ses instrus ; les synthés ou les suites de claps par exemple. Sur « The Terrible Effect Of Purple Drank », il y a des bruits de klaxons que j’ai samplé sur des tracks de Missy Elliott. Et pour revenir à ce qu’on disait sur la dimension second degré, certains reconnaîtront le vocal que j’ai utilisé pour La Pulga. C’est un gamin qui a buzzé pendant la coupe du monde en se filmant dans les rues en Argentine. « Messi, traeme la copa !« 

Release Party le 25 octobre chez DDD.

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