Selon Konstantin de Giegling, les femmes DJ « sont généralement plus mauvaises que les hommes » et « trop soutenues »
Malaise : alors que de nombreuses musiciennes et DJs se battent quotidiennement pour s’imposer dans un milieu majoritairement masculin – et parfois machiste, on vous en parlait l’année dernière avec foules d’anecdotes -, Konstantin, le fer de lance du collectif Giegling, a débarqué hier avec ses gros sabots… Et ses idées de macho. Tout part du magazine allemand Groove. Dans un article extrait de leur dernière édition (et envoyé en format digital à leurs abonnés), la journaliste Laura Aha s’étonne de la quasi-absence de femmes chez Giegling, qu’elle compare alors à un « boy’s club ». Mais alors que l’auteur s’attend à ce que Konstantin regrette cette homogénéité, comme la plupart des patrons de labels ou têtes de collectifs aujourd’hui, le DJ roumain a avoué trouver ça injuste que les DJs femmes soient aussi soutenues en ce moment, alors que, selon lui, elles sont généralement de pires DJs que les hommes. « En suivant sa logique, comme il dit, il est bien plus facile pour les femmes d’avoir du succès en tant que DJs, puisque les rares femmes qui s’intéressent au DJing sont promues de manière disproportionnée », écrit Laura Aha. Et ça continue : « Il justifie ses opinions avec des références pseudo-scientifiques arguant que l’appétit ‘naturel’ pour le pouvoir et la reconnaissance est un trait inhérent aux hommes. Les femmes qui souhaitent construire une carrière dans l’industrie du DJing, dominée par les hommes, doivent alors perdre leurs ‘qualités féminines’ et devenir ‘masculines’« .
Si on résume, pour Konstantin, qui se pose en porte-parole d’un label et collectif respecté, les femmes DJs sont :
1. Moins douées
2. Trop soutenues
3. Obligées de devenir masculines
Au secours.
Dans le même article, Laura Aha de Groove est allée interroger le DJ Dustin et la graphiste Frauke, cette dernière étant l’une des rares femmes du collectif. Les deux se sont distanciés des propos de Konstantin – qui est quasiment le seul à donner des interviews pour que Giegling s’exprime par une seule voix. Quant au principal intéressé, il joue la carte du « c’était pour rire » : « Je suis vraiment désolé pour ces propos. Il ne s’agit pas d’une citation directe et ils sont, à mon avis, trompeurs. A vrai dire, j’ai appris à mixer avec mon amie Sarah, et je ne pense évidemment pas que les femmes soient de pires DJs que les hommes. Je regrette ce qui a été dit dans une conversation privée avec la journaliste, qui n’a pas été sensible à mon mauvais sens de l’humour et à mon habitude à exprimer des opinions à l’opposé de celles de mon interlocuteur, pour le remettre en question – même si parfois mes mots dépassent alors ma pensée », a-t-il envoyé à Resident Advisor. Sincère ? Pas selon Palms Trax, qui qualifie sur Twitter de « conneries » les justifications de Konstantin, tandis que The Black Madonna assure avoir déjà entendu le DJ roumain tenir de tels propos sexistes, une version corroborée par « de nombreuses personnes avec qui j’ai pu en parler ». « Que dieu aide ce mec si les gens qui connaissent toute l’histoire commencent à parler, car c’est mille fois pire que dans cet article. Croyez-moi », ajoute-t-elle.
En 2017 et alors que Nina Kraviz, The Black Madonna, Ellen Alien ou Paula Temple jouent partout dans le monde, produisent ou montent des labels, le cliché de la DJ moins bonne techniquement, forcément potiche si elle est féminine et promue uniquement pour son genre peut encore s’entendre dans la bouche de certains clubbeurs, promoteurs et artistes. Jackmaster, en février dernier, le dénonçait sur Twitter, une démarche rare chez les DJs hommes et applaudie par de nombreux artistes comme Eomac, Jennifer Cardini ou Midland. Mais visiblement, il y a encore un peu de chemin à faire.