Récit d’un samedi soir agité aux Femmes S’en Mêlent
Vingt-deuxième édition pour Les Femmes S’en Mêlent. Oui, déjà. Ce qui signifie que ce bon vieux festival, qui met ces dames à l’honneur, est peu ou prou aussi vieux que OK Computer, Princesse Mononoké ou encore la dissolution de l’Assemblée nationale. Voilà qui ne nous rajeunit pas, comme disent les personnes très ringardes. Mais qu’importe, ce soir justement, nous retrouvons nos vingt ans (à peu près) le temps d’une soirée musicale chaude, riche et dense. Impossible de tout voir, évidemment, alors voici quelques morceaux choisis de choses vues et entendues en ce samedi soir au Trabendo.
Les hostilités démarrent avec Ionnalee, dont c’est le tout premier passage sur scène à Paris, et même en France, avouera-t-elle plus tard. Mais Ionnalee, qu’est-ce que c’est ? Un savant mélange entre Uma Thurman (pour la blondeur immaculée), Barbarella (pour la tenue de scène excentrique et un brin kitsch), et un CHVRCHES un peu plus arty et sombre (pour les compositions). Et ce cocktail improbable nous vient de Suède, un pays qui n’a plus grand chose à prouver pour la qualité de sa musique (ceux qui viennent de penser »Abba » sont disqualifiés d’office). Durant un set court mais intense devant un public assez clairsemé mais qui se densifiera au fur et à mesure – beaucoup profitent de la terrasse – nul doute que Jonna Lee de son vrai nom aura rallié des nouveaux fans à sa cause. L’on tiquera peut-être un peu sur l’installation vidéo qui accompagne la prestation, entre animations 3D d’un goût discutable et effets psychédéliques stroboscopiques heureusement un peu plus réussis.
À peine le temps de souffler et de prendre l’air, voilà déjà Sink Ya Teeth qui s’installe et les lumières qui s’éteignent de nouveau. Deuxième service. Et là encore, un baptême de scène à Paris. Nous voici cette fois-ci dans une approche tout aussi dansante mais tout de même un peu plus rock. En effet, Sink Ya Teeth se compose d’une vraie basse et une batterie électronique pour donner une assise plus massive aux compositions. Hybridant de petits accents post-punk et une approche finalement très pop, le duo britannique met vite fait bien fait tout le public dans sa poche. Maria Uzor, en véritable femme-orchestre, passe de la batterie électronique au clavier (sans oublier de chanter !) tandis que Gemma Cullingford assure sans broncher sur sa quatre-cordes.
Une petite pause plus loin (et après un mini DJ-set pour patienter sans se relâcher), c’est à présent Dope Saint Jude qui s’empare de la scène. Exit les fjords suédois ou la grisaille britannique, c’est maintenant du côté des townships que l’on va faire un tour avec Dope Saint Jude, artiste sud-africaine originaire du Cap. Changement radical d’ambiance : plus question de grâce synthétisée ou de dance-punk pour faire vibrer les foules, ici c’est le ghetto qui parle. Avec un flow énervé et des instrus au diapason, le trio se déchaîne tout au long d’un set qui ne laisse jamais une seule seconde de répit au public. Que l’on accroche ou non à la musique de Dope Saint Jude, on ne peut nier son investissement impressionnant sur scène.
Les contingences des transports parisiens étant ce qu’elle sont, la soirée s’achèvera là. Trois artistes, autant d’ambiances différentes, de l’éclectisme, des sets concis et fort efficaces : voilà ce que nous aura offert Les Femmes S’en Mêlent en ce samedi soir. Le rendez-vous est pris pour l’an prochain, histoire de voir 1997 s’éloigner encore davantage et de profiter d’un coup de vieux chaque année plus cinglant…