Tsugi Podcast 603 : #130E0A
Elle signe le podcast 603 : #130E0A. Derrière cette mystérieuse dénomination, il y a Masha Litvak, DJ et productrice franco-ouzbek, jeune espoir de la musique électronique française.
Après les productrices Bergsonist et Kelly Lee Owens qui signaient les podcasts 600 et 601, c’est à #130E0A que Tsugi donne carte blanche pour un mix. Car comme #130E0A, on est soucieux de mettre en avant ceux qu’on entend moins. C’est son credo, ça et jouer la meilleure musique possible, qu’elle vienne des artistes féminines ou de l’ex bloc soviétique – ce qu’elle fait dans son émission mensuelle sur Rinse France New East Sounds.
Amatrice de UK techno, breakbeat et bass music, #130E0A aime aussi s’égarer vers l’ambient et l’experimental. En 2019, elle s’est notamment faite remarquer par sa présence sur les compilations de Vernacular Records (Vernacular Foreigners VA) et Earth Plate (Vol.1 : Louis Louis / DJ Life / Gnork / #130E0A), dans lesquelles elle mettait le breakbeat à l’honneur. Pour Tsugi, elle démontre ses talents dans la maîtrise de ces genres britanniques nerveux (UK bass, 2-step, jungle, breakbeat) et livre un mix multicolore – littéralement, comme elle nous l’explique ci-dessous.
« Musicalement, j’observe aussi que la scène se diversifie, qu’on sort de la dichotomie house-techno comme nec plus ultra de la musique club. »
Parle-nous de ce podcast, qu’as-tu voulu faire ici ? Qui sont certains des artistes pour toi ?
C’est un patchwork des univers musicaux que j’aime, qui commence par de la bass music assez froide, aux teintes grises et bleues marine, et qui évolue vers des morceaux plus lumineux, plus denses, plus violets, bleus et jaunes, pour finir sur de la musique expérimentale qui sonne un peu New Age, dorée. En gardant toujours la trace des rythmes déstructurés, des percussions qui cognent de partout, des synthés qui envoûtent le cerveau limbique. Niveau artistes, j’ai inclus deux tracks de NVST, Jan Loup et Flore, qui sont des nanas dont j’admire beaucoup la musique ces derniers temps. Il y a aussi deux morceaux sortis sur le super label suisse Strecke, que m’a fait découvrir mon ami genevois Georges alias Estebahn, également présent dans mon podcast. Pour le reste, il y a des classiques de la scène UK bass – Facta remixé par Beneath, Detboi, Walton (qui a remixé Flore) -, des classiques de l’IDM – The Future Sound of London, The Orb – et même un son de Grimes, dont j’ai redécouvert les premiers albums récemment (surtout Halfaxa) et qui m’ont confirmé que cette artiste est un cadeau des aliens à la pop music. Bref, il y a pas mal de trucs différents qui s’entremêlent.
Quel est ton sentiment sur la scène électronique française aujourd’hui ?
Un énorme plaisir à voir de plus en plus de meufs sortir des morceaux, mixer un peu partout, se serrer les coudes, bref, s’approprier cet espace culturel qui demeure si insécure pour nous. Mais une toute aussi énorme colère face à l’omerta qui subsiste au regard des agresseurs et violeurs bien trop nombreux dans un mouvement qui se revendique comme alternatif et progressiste. Je suis admirative et reconnaissante du travail effectué par D.I.V.A, Act Right, Music Too, Décolérées, Consentis, Les Soeurs Malsaines… pour ne citer que ces personnes, afin de rendre cette scène plus safe et inclusive. Musicalement, j’observe aussi que la scène se diversifie, qu’on sort de la dichotomie house-techno comme nec plus ultra de la musique club. L’ambient gagne en popularité, en réponse à la remontada des musiques plus violentes comme le gabber. Et entre les deux, il y a pléthore de bons sons breakés, downtempo, un peu trance, un peu jungle, un peu dancehall, un peu pop. Avec des artistes qui mélangent tout ça et qui à mon sens, sont les plus intéressant·e·s (spoiler alert : ils et elles se trouvent surtout à Lyon, à Toulouse, et même à Reims).
« Un énorme plaisir à voir de plus en plus de meufs sortir des morceaux, mixer un peu partout, se serrer les coudes, bref, s’approprier cet espace culturel qui demeure si insécure pour nous. »
Maintenant, c’est quoi la suite pour toi ?
Je continue ma résidence chez Rinse, où j’inviterai tous les mois une femme ou une personne non binaire pour jouer. Avec Mimi et Elise Kravets, on a ce projet issu d’une blague, le Nice Girls Club, qui consiste à mixer n’importe quoi et raconter des trucs pas super intéressants – histoire de sortir du vortex puriste dans lequel on tombe parfois. Avec Raoul, un de mes meilleurs amis, on tient aussi un blog nommé Zone du Temps Suspendu sur lequel on publie des textes, vidéos, podcasts et tout contenu en lien avec l’idée de ralentir. Dès que le contexte nous le permettra, on organisera des après-midi ambient avec poufs et Palo Santo pour reposer son esprit de tout ce bourbier environnant. En attendant, je conjure le climat anxiogène et le seum ambiant en regardant Les Marseillais VS le Reste du monde.
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Tracklist du podcast 603 :
Facta – Alsatian (Beneath remix) [Bloc.]
Flore – Coded Language (Walton remix) [Polaar Sounds]
Ghast – Kubieko [Glome Sounds]
Debtoi – All I Need [Metalheadz]
Exhausted Modern – Something strong ft. NVST [Endless Illusion]
Chungo – O O O O [Dudbridge Garage]
Septentrio – Hardcore Continuum (Noria Lilt remix) [strecke records]
Alain MS20 – Tarkeuss (Jan Loup remix) [Kraken Records]
Grimes – My Sister Says the Saddest Things [Arbutus]
CJ Bolland – Con Spirito [R&S]
DJ Pelouse – Pana Coton (Tim Karbon remix)
Goldefish – Radon [Gated Recordings]
Endless Mow – Fey Dor [All Centre]
Ivory A Ivy – 4real (ft. Vice Vice) [strecke records]
Estebahn – Himsagar [Brainwaves]
Future Sound of London – Yage [Virgin]
The Orb – O.O.B.E (Andy Hughes mix) [Sonic Book]
Tangerine Dream – Phaedra [Virgin]
Réécouter les podcasts de Skee Mask, Bergsonist, Kelly Lee Owens,
Slowglide, Marina Trench ou Jon Beige…