Philippe Zdar raconte ‘Bankrupt !’ (partie 1)
On ne change pas une équipe qui gagne. Le vieux cliché s’avère une nouvelle fois très efficace. En travaillant à nouveau avec Philippe Zdar, ce coup çi officiellement intronisé “producteur”, après le carton de leur précédent album, les Phoenix sont restés en terrain connu. Mais la “dream team” s’est réinventée en donnant à Bankrupt ! une tonalité futuriste qui se bonifie au fur et à mesure des écoutes. La marque des grands disques. Un nouveau cliché là encore plus que jamais d’actualité. Ce n’est pas Philippe Zdar qui nous contredira.
Comment ça se passe maintenant entre toi et Phoenix, c’est genre : ils t’appellent : “bon on a un album sur le feu, tu viens”?
Non, ce n’est pas automatique, mais depuis la fin de Wolfgang Amadeus Phoenix on a parlé entre nous de l’idée de se retrouver. Même si je ne savais pas si c’était une bonne idée parce que je crois que c’est très dur de retravailler ensemble après un gros succès. Mais ils m’ont dit qu’ils aimeraient bien qu’on continue, donc je leur ai répondu : “allons y et si on arrive à faire des chansons aussi bien ce sera super.”
Est ce que ton rôle a évolué ?
Oui car ils n’ont jamais eu de producteur auparavant. Ce rôle s’est décidé pendant la fabrication du disque. il y avait un truc de confiance, même si je n’en voulais pas vraiment de ce statut de “producteur”. Pour moi “produire” c’est un peu comme donner des conseils à un copain. Il y avait beaucoup moins de gêne que pour l’album précédent où j’avais un peu peur de dire certaines choses, là c’était entériné. On était conforté de voir aussi qu’on avait pris les bonnes décisions. Et quand les autres te portent une énorme confiance, tu prends un peu plus de place, tu deviens un peu une sorte de membre externe du groupe. D’ailleurs ils m’ont dit que tu étais devenu le 5ème Phoenix… C’est super s’ils disent ça parce que c’est aussi ce que je ressens. C’est vrai que mon implication était plus forte. Quand on a commencé à travailler, j’ai senti que c’était pour moi aussi une question de vie ou de mort.
Est ce que c’est toi qui a apporté cette touche électronique ?
Non, quand j’arrive sur le disque, les morceaux sont déjà écrits. On a écouté hier avec des amis qui m’ont dit “c’est fabuleux, il y a beaucoup plus de synthés, c’est plus électronique.” Mais aucun de nous n’a dit : “tiens ce disque doit être plus électronique ou plus ceci ou plus cela”. On avait des fantasmes que l’on voulait approcher mais ce n’était pas des fantasmes électroniques. On veut faire de la pop comme Bowie, Prince, ou Dylan qui change de son constamment au cours de sa carrière. Mais c’est vrai qu’il y a plus de synthés. Le dernier morceau que l’on avait fait sur l’album précédent c’était “Love Like A Sunset” où on touchait du doigt un truc dément, qui nous faisait penser au moment au Prince se lançait dans Sign Of The Times. Et on commencé Bankrupt ! comme on avait terminé Wolfgang. C’est la suite logique. Dans dix ans quand on écoutera les albums de Phoenix à la suite, on se rendra compte que c’est comme un fil qui continue.
Bankrupt ! semble plus complexe… I
l y avait une vraie volonté d’écrire des chansons à la manière d’orfèvres comme Dylan. On a l’impression que c’est la production, mais c’est plus l’écriture des chansons qui crée du coup une complexité de la production. Parfois j’entends des disques où je me dis : c’est génial, les chansons sont fantastiques, mais on dirait qu’il y a eu une mésentente entre la production et l’écriture.
C’est un album qui n’est pas évident à la première écoute, il s’apprécie vraiment dans la durée…
On sentait tous que c’était un “grower” comme disent les Américains. Un disque qui grandit en toi, mais quand il grandit, il grandit comme un arbre pas comme une tige de bambou et tu l’aimes vraiment. Il y a quand même dans les morceaux des petites clés, des petites portes. J’adore les albums qui durent dans le temps, comme ces mêmes disques que tu écoutes en vacances des milliards de fois. Quand Wolfgang est sorti c’était la même chose. On nous a beaucoup dit ça : attention c’est un disque dans lequel il faut entrer dedans. J’espère que Bankrupt ! est un disque que les gens pourront se remettre en boucle. Comme les meilleurs disques que j’ai eu dans ma vie.
Propos recueillis par Patrice Bardot