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© Ronnie Zeemering
16 février 2023

On va écouter quoi ces prochains mois ? Voici sept artistes repérés à Eurosonic

par Clémence Meunier

Dans le froid de janvier, une petite ville du nord des Pays-Bas accueille tous les ans le festival Eurosonic. Et voilà que Groningen (Groningue en VF, mais on est d’accord, c’est moins joli) fourmille pendant trois jours de concerts de groupes venus de tout le continent, et accueille les Music Moves Europe Awards, récompensant la fine fleur des artistes émergents européens. On y a repéré sept artistes qui vont assurément squatter nos playlists toute l’année.

À peine remis des Trans Musicales et la dinde de Noël tout juste digérée, tout le petit monde de la musique européenne s’est donné rendez-vous dans le centre-ville de Groningen. Pourquoi ? Ce ne sont pas les jolies rues pavées, le canal entourant le quartier ou les croquettes vendues dans des distributeurs automatiques qui attirent tous ces programmateurs, bookeurs et journalistes – quoique, si vous passez à Groningen, goûtez les eierbals, ces œufs durs entourés d’une purée au curry, panés, puis frits : c’est un régal et ça réchauffe le ventre.

 

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Non, si Groningen voit sa population de 230 000 personnes quelque peu gonfler début janvier, c’est parce qu’elle accueille Eurosonic Noorderslag (ESNS pour les intimes). Un copieux festival de showcases, à savoir un événement recevant des groupes émergents, venant jouer des sets plutôt courts (40 minutes le plus souvent), devant un public local (un peu) et professionnel (beaucoup). L’occasion rêvée pour découvrir en live tel groupe de rock serbe, ou telle sensation pop croate… Et découvrir avant tout le monde la nouvelle sensation de la pop, du rock, des musiques électroniques ou tout ça à la fois. C’est là que l’on a entendu pour la première fois Angèle, n’ayant alors sorti qu’un seul single, bien avant qu’elle ne prenne un virage variété convenant un peu moins à ces pages. C’est aussi là que l’on s’est pris notre première claque Psychotic Monks, fascinant groupe rock que l’on a voulu inviter quelques années plus tard sur notre Tsugi Birthday Tour. Sur la trentaine de concerts à laquelle Tsugi a assisté cette année, entre deux interviews (à venir très prochainement sur Tsugi.fr), notre coeur a flanché par sept fois. Suivez le guide.

 

Maestro Espada (Espagne)

C’est notre plus gros coup de foudre de cette édition 2023, et le genre de projets que l’on n’aurait peut-être jamais pu découvrir si vite, ailleurs qu’à Eurosonic. Maestro Espada est un duo de frères originaires de Murcia, dans le sud de l’Espagne, qui se sert de l’héritage folklorique de leur ville pour créer une hybridation électronique absolument fascinante, tantôt douce et harmonieuse, tantôt empreinte de mélancolie ou de noirceur. Pour le moment, deux titres seulement existent en ligne, mais quels titres ! Il faut dire qu’Alejandro et Victor ont bien su s’entourer : leur futur premier album va être produit par Raül Refree, qui était aux manettes du premier disque d’une certaine Rosalía. Après la claque de leur concert à l’Akerk, une église transformée en centre culturel, entre synthétiseurs et instruments traditionnels, on comprend pourquoi le producteur, coqueluche des artistes espagnols actuels, s’est entiché de ces deux frères. À surveiller de très, très près.

Eurosonic

© Ronnie Zeemering

KOIKOI (Serbie)

Ils étaient nommés aux Music Moves Europe Awards, la cérémonie de remise de prix organisée chaque année à l’occasion d’Eurosonic et récompensant les talents européens de demain. Et comme souvent, le comité de sélection des MME Awards ne s’y est pas trompé : KOIKOI est excellent en live. Ce groupe rock de Belgrade taquine le shoegaze, le psychédélisme, le kraut, et gueule des refrains en serbe que l’on se fiche bien de ne pas passer à la moulinette Google Trad’. Le tout porté par des synthés joliment perchés, et des choristes à la voix claire et pincée, typique des chants des pays de l’est. À voir dans une fosse en sueur, où le chanteur et guitariste Marko Grabež aime d’ailleurs descendre quand son concert prend des airs d’explosions volcaniques.

 

Baby Volcano (Suisse)

Plus qu’un concert, ce sont des performances que propose Baby Volcano. Le torse nu et tâché de sang, la danse désarticulée, la posture de rappeuse belliqueuse, la Suissesse met en scène son corps athlétique sans le sexualiser, le montrant pour ce qu’il est : un merveilleux vaisseau pour sa musique hybride, entre hip-hop, trap et pop sud-américaine. Déconcertant, clairement, mais captivant.

 

Bulgarian Cartrader (Bulgarie/Allemagne)

« Cette chanson a fait de moi un millionnaire du streaming, ça m’a permis de payer l’assurance de la voiture », balance en riant le moustachu Bulgarian Cartrader avant d’entamer son hit « Golden Rope« . Mais la discographie de ce musicien bulgare, installé aujourd’hui à Berlin, ne se limite pas à un seul morceau : c’est bien simple, l’entièreté de son set était composé de tubes. Des petites merveilles pop, feel-good, dévoilées entre deux blagues et autant de pas de danse. Ou comment allier avec une facilité déconcertante charme, humour et voix soul (c’est qu’il chante bien le bougre !).

 

November Ultra (France)

Elle vient de remporter la Victoire de la Musique de la révélation féminine de l’année. Et c’était peut-être la seule Victoire de la soirée à vraiment avoir un sens, suivie par un discours qui en avait tout autant : en larmes, November Ultra a rappelé que sa mère lui avait dit « tu sais, les enfants d’ouvriers c’est rare qu’ils arrivent à devenir artistes… Regarde maman ! » Sa maman avait déjà de quoi être fière un mois plus tôt, quand la chanteuse française a créé un moment hors du temps, une bulle de douceur et de beauté à Eurosonic, dans l’église luthérienne de Groningen. Seule en scène, tantôt à la guitare tantôt aux claviers, en espagnol comme en anglais, November Ultra touche, transporte, avec ses chansons de bedroom pop dépouillées et émouvante. Alors oui, on est sur de la tristesse, de la nostalgie, de la mélancolie, pas sur un concert de la Compagnie Créole. Mais elle ne manque jamais de détendre un poil l’atmosphère entre deux ballades, histoire de ne pas trop filer le bourdon. Oui, Mélanie Pereira, au civil, est drôle, naturelle et maligne. Mais elle aurait pu être chiante comme la pluie qu’on aurait quand même adoré son concert. Frissons.

© Ben Houdjic

 

Chibi Ichigo (Belgique)

Une grosse influence Prodigy et Chemical Brothers, des paroles rappées en russe, les BPMs qui s’affolent… C’est à peu près la recette imaginée par cette pile électrique de 24 ans, Belge d’origine Russe, accompagnée sur scène de danseurs tout aussi énergiques – et portés sur le voguing. Un chouette bonbon pour décharger les tensions et danser un bon coup.

 

Heartworms (Royaume-Uni)

Comme pour Maestro Espada, les possibilités d’écouter Heartworms en streaming sont pour l’instant limitées : l’Anglaise n’a que trois singles à son actif. Mais cela suffit pour entourer son nom d’un gros rond au marqueur rouge dans nos carnets d’artistes à suivre. Nouvelle signature du label Speedy Wunderground, où l’on croise également Squid, Flamingods, black midi ou Black Country, New Road (on ne va pas citer tout le catalogue : tout est très bon), Jojo Orme dévoile petit à petit un rock tendu, nerveux, porté par des paroles scandées ou chantées, surfant sur la vague post-punk qui déferle en ce moment sur le Royaume-Uni et l’Irlande tout en y ajoutant une insolence toute personnelle. C’est sûr et certain : on va encore en entendre parler.

© Bart Heemskerk

Visitez le site du festival Eurosonic

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