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Capture d'écran du film
22 juin 2020

On a vu le film-docu sur toute la carrière de Laurent Garnier

par Alexis Bernier

En parti financé par Kickstarter, le long-métrage Laurent Garnier: Off The Record de Gabin Rivoire retrace la carrière de Laurent Garnier autant que l’histoire de la techno. Le film de 1h30 interroge de très nombreux acteurs de la scène et dévoile de passionnantes archives. Une réussite.

« Pourquoi est-ce que j’aime autant la house et la techno ? J’ai toujours été un grand fan de musique, j’ai aimé le punk, le rock, le reggae, la soul, la disco, et la house et la techno regroupent l’essence de tous ces genres musicaux. C’est la musique que j’attendais. » Ainsi s’exprime Laurent Garnier en ouverture du très réussi documentaire de 90 minutes que lui consacre Gabin Rivoire. Fruit de plusieurs années de travail et de tournages internationaux, Laurent Garnier: Off The Record, vient d’être envoyé aux 2 800 participants du Kickstarter qui ont aidé à son financement avec les sociétés de production Anton, Featuristic Films et Agent Double. Récemment diffusé sur une chaîne de télévision belge coproductrice, le film va maintenant faire la tournée des festivals avant de trouver, on espère au plus vite, le diffuseur français qu’il mérite.

« Pourquoi est-ce que j’aime autant la house et la techno ? »

Une des réussites du film aux images léchées (notamment d’élégants ralentis) de Gabin Rivoire – dont c’est la première réalisation – tient à la manière dont il entrelace avec brio l’histoire intime du DJ préféré des Français avec celle de l’émergence de la techno à partir de la fin des années 80. Avec des archives rares (et toujours bien intégrées) ou tournées pour l’occasion, Off The Record retrace les deux en parallèle d’autant plus facilement que la carrière de Laurent se confond avec l’explosion de la dernière grande révolution musicale du XXe siècle. Avec ce qu’il faut d’ellipse et de partis pris (Garnier se montre un DJ international, bien plus que franco-français), Off The Record réussit un résumé pédagogique sans être lénifiant de cette aventure musicale. Mais plus que la leçon d’histoire, c’est la dimension humaine de cette existence riche de passions et d’amitiés autant que de musique, qui est mise en avant.

Sans être un exercice critique, Off The Record n’est jamais uniquement construit à la gloire de Laurent Garnier. « Il est l’opposé d’une rock star », comme le rappelle Georgia Taglietti du festival Sonar. Et Off The Record nous le dévoile dans son intimité avec ses (éternelles) angoisses (avant de jouer notamment), ses questionnements, sa générosité, ses amis ou, lors d’une très belle scène, avec des élèves de quatrième qui réalisent une exposition sur la musique. Certains produisant déjà eux-mêmes. Le déménagement dans une nouvelle maison « quelque part en Provence » de sa collection de 55 000 disques, dont « quatre mètres linéaires d’albums de funk et un mètre cinquante de pop française » qu’il couve avec une tendresse de « barjot », devient « une véritable affaire de débile mental ».

Si le film passe par Detroit, Chicago, Berlin et bien évidement par sa « maison » le Rex Club – où l’on retrouve son premier gardien et compagnon de route de toujours, Christian Paulet – ce sont les épisodes britanniques qui sont sans doute les plus drôles. Notamment parce que Garnier évoque comme jamais (et avec des photos complètement dingues) la période où il travaille le jour en tant que majordome à l’Ambassade de France à Londres et où la nuit il découvre le monde des clubs. Et c’est « le sens de l’humour » et la « personnalité originale » qu’il donne à ses premiers mixes qui vont, comme le raconte le VJ anglais Dani Jacobs qui l’a découvert, l’amener à jouer à l’Hacienda quelques mois avant l’explosion de l’acid house. Le « Summer Of Love » anglais, Laurent ne le vivra pas puisqu’il sera forcé de rentrer en France pour faire son service militaire, mais sa carrière est lancée. Il sera DJ !

On ne spoilera pas les épisodes suivants et les surprises de cette histoire que le film retrace avec une multitude de documents inédits, mais tout au long de Off The Record, Laurent Garnier et les très nombreux intervenants (Jeff Mills, Pedro Winter, Manu le Malin, DJ Pierre, Jacques, The Black Madonna… et tant d’autres) insistent sur la dimension culturelle, mais aussi politique, de cette musique du futur qui est devenue celle de notre présent.

Ah oui, ne soyez pas surpris, on entend longuement dans le film une chanson de Sacha Distel, « La belle vie », signe que Off The Record n’est définitivement pas un film techno comme les autres.

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