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Crédit : Romain S. Donadio
28 juin 2017

On a discuté avec les programmateurs de Dour… Et ils vous offrent votre pass cinq jours !

par Clémence Meunier

Solange, Vitalic, NAS, Phoenix, Metronomy, De La Soul, PNL, Justice, Manu Le Malin, Jagwar Ma, The Kills, Nina Kraviz… N’en jetez plus ? Déchiffrer le line-up de Dour est chaque année un défi : qui retenir, qui citer en tête d’affiche, qui aller voir absolument parmi les 250 groupes programmés au festival belge, revenant cette année pour sa 29ème édition, du 12 au 16 juillet ? On a envie de ne donner qu’un seul conseil : débrouillez-vous. Ou, plus sérieusement, laissez-vous porter selon vos envies du moment. Car c’est tout l’intérêt de Dour : en spécialisant ses scènes (la Jupiler Boombox plutôt hip-hop, le Dub Corner et son – vous l’aurez deviné – dub, la Red Bull Elektropedia Balzaal et ses sets techno et house, le Labo pour les découvertes…), le festival permet à ses spectateurs de voguer de style en style, en fonction de l’humeur, en tablant toujours sur des artistes et groupes à l’image à peu près indé – pas d’Elton John ou de Metallica à Dour, donc. Dans les faits, on pourra par exemple cette année être envoûté par le live de Trentemøller… Pour, en quelques enjambées, aller ensuite se retourner les semelles sur la drum&bass de Noisia. On a discuté de cet art du grand écart avec Alex Stevens et Mathieu Fonsny, les deux programmateurs du festival.

Mais avant cela, place aux cadeaux ! Dour et Tsugi vous font gagner un pack exceptionnel : un pass 5 jours (camping inclus) pour deux personnes. Les deux veinards pourront également se servir à hauteur de 250 euros (!!!) parmi tout le beau merchandising du festival (exemple ci-dessous), et auront des petits tickets boissons et repas… De quoi passer une semaine belge dans les meilleures conditions possibles.

Pour les gagnants suivants, il y a également deux pass pour deux personnes à choper, pour le jour de votre choix. Et oui, c’est un concours de fous furieux. Pour y participer, rien de plus simple : envoyez un petit mot doux à l’adresse [email protected], accompagné d’un gif ou d’un montage qui représente Dour pour vous. N’oubliez pas de mettre « concours Dour 2017 » en objet de mails pour être sûr que votre participation soit prise en compte. A vos Photoshops, à vos Paint, on attend vos créations !

L’originalité de Dour, c’est que vous proposez une programmation très large, allant de Solange à du metal, sans non plus tomber dans l’écueil du festival fourre-tout et sans cohérence. Cela tient évidemment au fait que chacune des sept scènes est spécialisée, comme s’il y avait sept festivals en un. Mais d’où vient cette volonté d’éclectisme ?

Alex Stevens : C’est l’histoire de Dour qui fait ça. Quand le festival a commencé dans les années 90, il y avait déjà de gros rendez-vous en Belgique – ça a toujours été un pays de gros festivals, avec le Pukkelpop ou le Rock Werchter. Ce n’était pas évident d’avoir les gros artistes face à ça. L’idée de Carlo Di Antonio, le fondateur, a été d’aller chercher tous les sous-genres qui n’étaient pas exploités par ces gros festivals. Il a fait venir du hip-hop, avec déjà De La Soul en 91, et a monté une scène électro dès 96, en partenariat avec le Fuse, un club emblématique de Bruxelles – ça ne se faisait pas tant que ça à l’époque, les festivals étaient plutôt portés sur le rock. Puis il a vu qu’il n’y avait pas vraiment de reggae non plus, et a installé une scène spéciale. Même chose avec le rap français, qui ne venait pas tant que ça en Belgique. C’était assez innovant à l’époque. Aujourd’hui, le festival a grandi, on arrive à avoir les grands noms. On n’a toujours pas les groupes évidents bien sûr, comme Radiohead ou Arcade Fire, qui arrivent à vendre plein de tickets. Mais de toute façon on n’en a pas vraiment envie. Par contre, certains sont en tête d’affiche chez nous avant de l’être ailleurs, comme Flume qui est venu quand il était encore tout petit – aujourd’hui, quand il veut faire un grand festival, il va le faire à Dour. Les Justice aussi ont été invités chez nous il y a dix ans, ils reviennent cette année. On s’est créé nos propres têtes d’affiche. Donc Dour, c’est ça : des styles musicaux qu’on ne voit pas dans les festivals généralistes, avec aujourd’hui des grands noms qui reviennent chez nous car on les a invités au début de leur carrière.

Mathieu Fonsny : Il y a un mot d’ordre chez nous : « alternatif ». On garde ça en tête. On n’a pas grandi en se payant de grosses têtes d’affiche, mais plutôt en enfonçant le clou sur toutes les cultures alternatives.

Vous citez Radiohead comme gros noms, mais il y a bien plus commercial non ?

Alex Stevens : Au niveau musical c’est sûr, mais ça reste un des groupes qui vend le plus de tickets pour les festivals européens.

Mathieu Fonsny : Mais plutôt que de s’offrir un Radiohead, je préfère vraiment inviter 50 groupes qui, mis bout à bout, auront beaucoup plus d’échos chez nos festivaliers. En plus, si tu habitues les gens à avoir un très grand nom, il faut proposer une énorme tête d’affiche chaque année.

Alex Stevens : Et si tu fais ça, les gens viennent pour le nom, pas pour le festival. Or, les gens disent « je fais Dour ». Pas « je vais voir Radiohead à Dour ».

Il y a tout de même de grosses têtes d’affiche cette année, comme M.I.A. ou Solange… Pour une programmation assez féminine. C’est une volonté assumée ?

Alex Stevens : Oui, on essaye. Selon les styles musicaux, c’est plus ou moins faciles : sur la scène dub par exemple, il faut faire un effort. Mais c’est possible, on a fait pas mal de recherches et on a invité LMK et Mo’ Kalamity. Aussi, le samedi soir, on a un plateau quasi 100% féminin (excepté Mall Grab) sur la scène du Labo, avec Marie Davidson, Demian Licht et DJ AZF. On ne se met pas de quota, on programme ce qu’on aime avant tout, mais on essaye en effet d’être attentif à la parité.

Crédit : Laurent Gélise

Une des nouveautés cette année, c’est la Cannibal Stage qui change de nom pour devenir La Caverne. Pourquoi ?

Alex Stevens : La Cannibal Stage était la scène metal et hardcore, des sous-genres peu exploités par les autres festivals. Mais on s’est rendu compte qu’avec le Hellfest, le Graspop ou aujourd’hui le Download Festival, trois événements qui se tiennent en juin, tous ces groupes là ne sont plus en Europe en juillet. Il faudrait qu’on paye très très cher pour les faire venir en avion. Et puis le public metal est un public particulier, qui ne vient voir que ça. Or on avait un peu de mal à se renouveler sur la programmation car les groupes ne sont tout simplement pas dans le coin. Du coup, on a décidé de faire une scène de rock dur certes, mais plus ouverte. Il y aura bien sûr du metal avec AmenRa par exemple, mais il y aura aussi The Kills, ou des ambiances plus garage avec Hanni El Khatib. L’idée était d’explorer une version plus large du rock dur, qui peut être aussi appréciée par des gens qui écoutent de l’indie. Le mot d’ordre du festival étant l’ouverture d’esprit, on part du principe que notre festivalier « lambda » apprécie autant écouter The Kills que Trentemoller… Ou que Damso !

En parlant de Damso, cette nouvelle scène rap belge est pas mal représentée sur le festival cette année. Comme expliquer cette scène à des gens qui n’y connaissent rien du tout ?

Mathieu Fonsny : Historiquement, comme le rap québécois ou le rap suisse, on est en Belgique les petits bâtards du rap français. Face à votre gigantesque scène rap, qui est une tradition chez vous, on a toujours été dans l’ombre, même si on a eu un petit âge d’or avec De Puta Madre, Rival ou Starflam dans les années 90. Et puis il y a eu un creux. Non pas qu’il ne se passait rien, mais parfois tu as besoin qu’il y ait plusieurs personnes qui fassent la même chose au même moment et qui collaborent, afin de créer une effervescence. Il y a quatre ans, un groupe appelé La Smala a remis le rap belge sur le devant de la scène, et beaucoup de groupes ont été créés suite à ça. Je peux t’en citer au moins une dizaine, entre Romeo Elvis, Caballero & JeanJass, L’Or du Commun, Le 77, Zwangere Guy, Hamza, Damso… Toutes les villes de Wallonie sont représentées, et on les a très vite mis en avant, en invitant la Smala dès 2014 par exemple. On essaye avec Dour d’être prescripteur des cultures alternatives, surtout celles de notre pays… Ce serait quand même con de ne pas les mettre à l’honneur ! On leur a alors demandé de mettre en place une création spéciale pour le festival cette année, « Bruxelles arrive ». Romeo Elvis, Caballero et JeanJass ont créé leur propre show, exclusif au festival. On avait déjà fait quelque chose comme ça l’année dernière avec le grime : plutôt d’inviter uniquement Skepta comme tout le monde, on a fait venir sept ou huit artistes grime.

Est-ce qu’il y aura un autre live un peu spécial cette année ?

Alex Stevens : On fait venir Binkbeats. C’est un mec qui débarque avec un petit camion rempli d’instruments. Il a ses propres compositions mais il reprend aussi Aphex Twin ou Flying Lotus. Ça prend trois voire quatre heures d’installation, ça fait plusieurs années qu’on souhaite le faire mais c’est compliqué à mettre en place. Cette année c’est bon, on peut enfin le faire venir à 19 heures le mercredi, en ouverture du festival, comme ça on a toute l’après-midi pour l’installer.

Mathieu Fonsny : C’est assez incroyable ce qu’il fait. Il est entouré de dizaines d’instruments, de cloches, de vibraphones, et il enregistre des loops. Et il refait « Window Licker » à lui tout seul !

Ce qui surprend quand on vient à Dour pour la première fois, outre l’immensité du lieu et la programmation, c’est l’ambiance hyper bon enfant, rythmée par les « doureeeeeuh » criés pendant tout le week-end. Comment faites-vous pour installer cet esprit sur le festival ?

Alex Stevens : Ça passe par beaucoup de communication, en insistant sur le fait que Dour doit être une bulle. On essaye que les gens viennent à Dour en oubliant leurs différences, de classe sociale ou d’origine géographique, pour écouter et découvrir des groupes, tout en faisant gaffe aux autres – on est dans un milieu festif, donc on répète régulièrement à nos festivaliers de faire un peu attention à leurs voisins, à ce qui se passe autour d’eux. Tu vas en festival, en feria ou au carnaval, car c’est un défouloir. Tu veux tout oublier, tu te déguises, t’y vas avec tes potes. Les gens qui vont à un festival juste pour aller voir Radiohead, ils vont simplement voir un concert en extérieur plutôt que dans une salle. Ici, on essaye de créer un festival dans le vrai sens du terme.

Ce sera la trentième édition de Dour l’année prochaine, vous y pensez déjà ?

Alex Stevens : Généralement, on prépare l’édition d’après pendant le festival : on prend des notes, on réfléchit aux améliorations. On se repose, et on revient en septembre pour discuter de tout ça. On a déjà prévu quelques petites choses, mais rien n’est acté pour le moment.

Crédit : Joseph Havenne

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