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11 mai 2022

Nouvel album, tournée UK, Pleyel : l’interview de Black Lilys, pépite indie pop

par Corentin Fraisse

« I hate this silence just before the storm ». Au fil des années le duo Black Lilys étale sa pop unique, solaire et viscérale, jusqu’à se faire un nom. Tsugi a pu les croiser juste avant leur premier concert à Pleyel pour parler de leur jeune carrière, de leurs récentes tournées, de ce qui les inspire… et surtout de ce nouvel album qui se prépare. Interview. 

Black Lilys c’est une soeur et un frère, Camille et Robin, unis par des liens aussi forts qu’invisibles et qui se (re)trouvent grâce à la musique : le groupe fut créé peu après la perte de leur mère. Après l’EP Blood Ties ils sillonnent les routes, grandissent, puis sortent leur premier album Boxes en 2018. Ils connaissent une notoriété inattendue à l’international quand leur titre « Nightfall » passe dans la série-événement Elite, hébergée par Netflix. Ils font quelques premières parties clinquantes comme Pomme, qu’ils suivent sur plusieurs dates, de la Cigale à l’Olympia.

Black Lilys c’est un univers marqué, intriguant, et une musique qui touche en plein coeur pour qui sait l’écouter. Ils se disent inspirés par Cat Stevens, Bon Iver, CocoRosie, Fever Ray et Agnes Obel. Et certains évoquent dans leurs compositions un brin de The XX, de Ben Howard, Björk, Angus & Julia Stone ou Aurora. On vous laissera seuls juges. Leur musique est délicate, souvent, et animale le reste du temps. Alors qu’ils revenaient d’une tournée en Grande-Bretagne, en support du groupe Nouvelle Vague, on a tenu à leur parler avant leur première date à Pleyel, en première partie de Zaz -oui oui.

 

Bon, parlons-nous de cette tournée outre-Manche !

C’était vraiment notre rêve de faire une tournée comme celle-ci, et d’aller toucher des gens qui sont habitués à écouter notre style de musique. Nos influences musicales, tous les groupes qu’on écoute viennent de là-bas. On s’est sentis à notre place, au bon endroit pour notre musique. L’accueil était dingue, le public était hyper bienveillant. En club ou en salle de concert, on a eu une super écoute même en première partie. Dans certaines salles en Ecosse, les spectateurs écoutent mais sont bavards, festifs, expriment fort leur joie.

 

Après l’interruption du covid, les automatismes et les émotions reviennent vite ?

Différemment. Mais oui clairement, ça revient très vite. Le fait de pouvoir jouer chaque soir sur un mois c’était fou ! On ne prend plus les choses pour acquises après cette période de vide. À chaque fois que tu montes sur scène, tu vois les salles pleines à nouveau, ça fait du bien. Pour beaucoup c’était leur premier concert depuis le covid… On se sentait tout émoustillés d’être sur scène.

C’est notre première tournée aussi longue sans rentrer chez nous : 18 dates en 25 jours, ça ne laisse pas beaucoup de jours off. Ça te permet de ne pas trop penser. Dans la musique, tout prend du temps. Tu prépares un clip pour un tournage dans cinq mois, tu termines un album pour qu’il sorte un an après… En tournée, tu prépares ton concert, tu fais ta balance, tu joues et tu enchaînes. Ça fait du bien d’être dans l’action, le présent.

 

Black Lilys

© Regenweibchen Photography

4 ans depuis votre premier album, le dernier c’était avril 2018. Vous essaimez des singles ces derniers temps. Vous avez un album en préparation ?

Ouais ! Il est prêt. Il sortira à l’automne. On avait besoin de partir, de se retrouver avec la nature pour s’inspirer, comme souvent. Et besoin de lâcher dans un endroit où t’as un peu de silence…

 

Vous me parlez un peu de là où il a été créé ?

L’album a été fait entre l’Écosse -Édimbourg principalement-, Lyon… et les Alpes françaises à Méaudre, dans une maison familiale vide. Il n’y avait pas de studio, donc on a ramené tout notre système. Et on s’est isolés là-bas. Cet album-là on l’a entièrement fait en home studio. On avait aussi besoin de le faire chez nous. On l’a même composé un peu à distance, parce que le covid est arrivé. Et en fait, on a adoré ! L’une en Ecosse, l’autre à Lyon, et on a fait mixer tout ça par un Norvégien, Odd Martin -musicien qui fut notamment co-auteur et producteur de nombreux titres d’Aurora-. On a mixé avec lui qui était à Bergen, chacun chez soi avec le même casque, et on écoutait en direct ce qui sortait de sa console. C’était un travail d’écoute et une discussion constante. Il a vraiment gardé ce qu’on avait déjà fait, mais en le mettant en valeur.

 

Donc le confinement, paradoxalement c’était une occasion pour vous ?

On faisait partie des gens qui avaient quelque chose sur le feu avant le confinement. Ça nous a donné le temps qu’il nous fallait. En plus on a été chanceux d’être à côté de la nature, presque tout le temps. À Méaudre, y’avait pas grand-chose d’autre que les montagnes tout autour. Je remarque que dans notre musique, on a souvent besoin de ça. Besoin de vide, de silence pour remplir.

 

On entendait beaucoup de sons organiques dans le premier album, sur vos derniers titres il y en a par endroits. C’est qqch qu’on retrouvera sur le nouvel album ?

Il va être très organique cet album, vu qu’il a été fait à la maison, t’as pleiiiin de sons. Un des titres a été enregistré dans un très vieil appart à Édimbourg, avec des fenêtres victoriennes. Et en fait, quand les voisins les lèvent ça fait un (insérer une très belle imitation de vitre qui s’ouvre) quand tu remontes ta vitre. Tu peux l’entendre dans « Störm ». Je me rappelle être avec mon casque, à attendre que les voisins se réveillent et qu’ils fassent le (retour de la belle imitation) waaaak. On a aussi enregistré des graines, des sons d’ambiance de guitare, la pluie à Méaudre pour « Gymnopédie ». Il y a toujours eu cette idée dans notre musique : capter un son unique dans un endroit précis, qui ne se reproduira pas, pour l’incorporer dans nos chansons. Même des sons qu’on ne contrôlait pas, des ‘accidents’ qu’on a décidé de garder.

 

Y’a quelque chose de changé dans vos percussions, non ?

Là dans l’album, les percus vont prendre une place particulièrement importante. Et on voulait que ce soit autre chose qu’une batterie, alors on est allés chercher des sons différents. Des tambours taïko, pas mal de percussions asiatiques… Je crois aussi que c’est une envie pour la scène, de se défouler sur des gros gongs, à la Woodkid tu sais.

 

Parmi vos derniers titres on a « Yaläkta », que vous jouiez déjà en live depuis quelques temps.

« Yaläkta » c’est sans doute LE titre qui nous suivra longtemps. Il résonne fort en nous, on lui trouvera toujours du sens. « Yaläkta » c’est juste un mot inventé à deux, parce que ce titre là est changeant. Parfois, donner un titre à une chanson ça bloque le chemin des possibles. Là ça ouvre différents sujets. Par moments sur le disque y’a des mots, des chants complètement inventés. Un langage plus émotionnel.

 

Au début de Black Lilys le piano n’avait pas une place énorme, au fil des titres il s’est agrémenté. Et puis là, full piano : comment ça se fait ?

Sur « Gymnopédie » on est revenus à un piano-voix très nu. La mélodie d’Erik Satie représentait notre enfance, notre mère adorait nous la jouer. J’ai [Camille] toujours fredonné sur cette mélodie, commencé à inventer des paroles. Et Roby m’a dit « mais en fait pourquoi on ne mettrait pas notre histoire dessus ? ». En plus cet artiste a une histoire entre l’Écosse et la France, donc le lien était fou ! Et c’est la première chanson d’amour que j’ai écrite.

Là pareil avec « Invisible Strings », carrément plus guerrier. Dans cet album on a les deux, il y a un truc un peu guerrier-rage assez nouveau pour nous, avec des cris, des percus tribales, comme un exutoire… Mais on a encore plein de titres doux ! Encore le ‘Black Lilys’, cette balance qui nous suit toujours, du sombre au lumineux. Et le dernier single « Störm », je pense que c’est le titre qu’on préfère de l’album.

 

Vous arrivez à tisser un lien entre ces titres ? Une thématique commune ?

Cet album a des couleurs différentes. Le premier, c’était comme les états d’âme d’un humain ; le nouveau parle de plein de sujets et de gens différents, plus un truc de groupe. Le fil rouge ? La douceur sur tous les titres, mais aussi une colère, saine et assumée maintenant, comme on peut tous ressentir. On avait de la puissance sur le premier album, mais pas mal de pudeur. La colère était intérieure, là on la projette.

 

Vous voir en première partie de Zaz, sur autant de dates, ça peut paraître étonnant.

On avait fait 3 dates avec elle avant le covid. Après notre tournée UK, elle nous a proposés de la rejoindre pour son Royal Albert Hall à Londres… « Par contre c’est dans 4 jours, vous pourriez venir ? » : et ben on est repartis ! C’était dingue cette salle, la plus ouf et la plus belle qu’on ait faite. Y’a eu trop de vies là-dedans, tu sens un truc puissant. En plus on était assez détendus. Pour le Royal Albert Hall quand même ! C’était hallucinant, sur scène on se regardait entre frère et sœur, c’était irréel… Tu sais que là-bas, la reine a ses propres toilettes ? Quand y’a des pauses, elle ne va pas aller dans les mêmes que tout le monde, elle a les siennes. C’était un peu la mini-quête, de retrouver les toilettes de la reine !

 

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Après le concert, Zaz nous a dit qu’elle nous voulait vraiment pour les deux soir à Pleyel, donc on se sent chanceux, on est hyper reconnaissants d’être invités.

 

Ces premières parties, qu’est-ce que ça vous apporte en dehors de la visibilité ?

C’est un vrai exercice. Les gens ne viennent pas pour toi, ça met un enjeu supplémentaire. Et ça nous permet de jouer dans des lieux où, par nous-même, on n’aurait pas pu accéder tout de suite. Le but c’est d’y retourner pour NOS concerts. C’est ce qui est arrivé à Zaz : elle avait fait le Royal Albert Hall en tant que première partie y’a dix ans. Et puis un peu comme avec Pomme, c’est une personne très lumineuse. On s’est trouvés humainement, sur des sujets sensibles… On s’est sentis connectés sur la protection de la planète, l’urgence sociale et climatique.

 

Retrouvez Black Lilys en streaming, sur leurs réseaux, ou évidemment en live :

14.05 Le Jam // La-Chapelle-Sur-Erdre
11.06 Les musicales du Rhône // Laveyron
02.06 Fête de la Musique // Thionville
19.10 Ancienne Belgique // Bruxelles
29.06 L’épicerie Moderne // Lyon
04.07 Golden Slippers // Londres
09.07 Leith Depot // Edimbourg

 

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