Matias Aguayo : « Je veux que ce groupe avec les Desdemonas devienne mon projet principal »
Matias Aguayo tout seul derrière ses machines, à retourner une Boiler Room en chantant ou à sortir des singles hyper dansants, c’est fini. Le producteur chilien mais vivant en Allemagne a d’autres chats à fouetter : après Iggy Pop & The Stooges, Bob Marley & The Wailers, faites place à Matias Aguayos & The Desdemonas et à sa new wave d’aujourd’hui… Mais il va falloir nous croire sur parole pour ça, ou attendre leur date du 16 avril au Badaboum à Paris (on vous fait gagner des places ici) : il n’y a aucun morceau à écouter pour se faire une idée du projet, seulement des lives auxquels assister. C’est le concept. Découvrir par la surprise, n’écouter que des unreleased en concert, faire confiance à l’auteur loufoque d’Ay Ay Ay… On en est capable, mais la curiosité a pris le dessus : après avoir écouté les fameux morceaux de ce nouveau groupe (nous sommes veinards), on a posé quelques questions à Matias Aguayo. C’est la première fois qu’il se confie sur ce projet, à moins de deux semaines de son premier concert. Il est à Berlin, au studio, en train de répéter. Par la fenêtre, on aperçoit le cimetière Matthäus, où sont enterrés les frères Grimm.
Peux-tu nous dire comment a démarré ton nouveau projet Matias Aguayo & The Desdemonas ?
Je suis d’abord allé à Cologne pour composer de nouvelles chansons avec seulement un clavier, un micro et une petite boîte à rythmes – pas d’ordinateur, je voulais revenir à la façon dont je travaillais à mes débuts. En écoutant mes démos, j’ai remarqué que je leur avais donné une ambiance très particulière, assez introspective, et que ces chansons devaient être jouées par un groupe, en concert. Je retrouve comme ça une autre facette de ce que je suis, à savoir quelqu’un du théâtre et de la scène, je l’ai un peu perdue quand mon travail de producteur m’a pris plus en plus de temps. C’est pour ça que j’ai inventé ce groupe, les Desdemonas.
Il y a très peu d’information en ligne, pas d’album à écouter… Pourquoi ?
On a enregistré toutes les chansons bien sûr, comme en live, je crois à la magie de la « prise parfaite » ! Mais je n’avais pas envie de rentrer dans l’appareil de promotion classique en sortant l’album pour tourner seulement ensuite. Je voulais que le groupe commence par la scène. Je trouve ça plus intéressant de dévoiler le projet par des performances plutôt que de demander à des gens de venir assister à un concert alors que tout est déjà disponible en ligne et qu’il n’y a plus de place pour la surprise.
Comment as-tu choisi les membres du groupe ?
Nous sommes quatre. Gregorio Gomez est le premier à qui j’ai joué mes nouveaux morceaux, on se connaissait déjà vu que j’ai déjà travaillé avec lui sur le projet Rio Negro sorti sur Comeme. Gregorio a un style très personnel, qui me rappelle la surf music et le psychédélisme, dans une veine presque sixties, et c’était ce que je recherchais. On a voulu mettre la main sur une guitare au son très particulier, une Fender VI, qui est une sorte de mélange entre une basse et une guitare. Heureusement les copains de Turzi nous ont prêté la leur !
Pour la batterie, c’est pareil, je savais ce que je voulais : un son de batterie assez soul, groovy, mais aussi très constant, sans faire cinquante changements de rythmes pour exprimer quelque chose. Matteo Scimali, un Italien vivant en Allemagne depuis presque toujours est le meilleur batteur que je connaisse, et il maîtrise exactement ce rythme que je voulais.
Et pour finir, Henning Specht, membre de Hypnolove, s’occupe des claviers. On a commencé à travaillé sur des remixes et j’aime beaucoup comme on travaille main dans la main pour développer des mélodies et des harmonies.
Vous commencez la tournée à Paris, au Badaboum. Pourquoi pas ailleurs ?
La France est un endroit important pour moi, j’ai déjà habité ici et j’y joue régulièrement – les gens ont toujours été réceptifs à ma musique en France. Ça me paraissait être l’endroit idéal pour commencer cette nouvelle histoire.
Ça a changé quoi pour toi d’être en groupe ?
C’est très nouveau pour moi de travailler de cette façon, mais c’était un rêve. J’ai toujours aimé me lancer sur des projets particulier. Par exemple, sur l’album Ay Ay Ay je n’utilisais que ma voix. Ce n’était pas un truc super conceptuel, mais plutôt une façon de travailler : je trouve que de s’imposer des contraintes est une bonne stratégie pour créer. Et puis, mon projet solo est bien plus accès club – il est possible de danser sur ce futur album avec les Desdemonas, mais pas comme en boîte !
Au niveau des paroles, à quoi faut-il s’attendre ?
Des thématiques reviennent encore et encore dans les paroles de cet album : la dualité, les mythes de doppelgängers, le contact mystique avec soi-même mais dans le passé… (rires) Ça peut paraître bizarre mais ce n’est pas un film d’horreur, plutôt un trip un peu psychédélique ! Quand j’écris des paroles, je commence toujours par marmonner un truc en pseudo-anglais, en yaourt. Avec l’aide de Rachel Graham, ma manager, on essaye ensuite de retrouver ce que cela signifie. Ça peut être une façon de me rapprocher de mon subconscient.
Pour avoir pu écouter l’album, j’ai été surprise par l’ambiance assez dark…
J’ai toujours eu un petit côté dark dans ma musique, surtout quand on regarde ce que je faisais au début. Pour plein de raison et notamment parce que tout le monde passe par différentes étapes dans sa vie, plus ou moins heureuses, ça a dû jouer. Aussi, quand j’ai commencé à faire de la musique, adolescent dans ma chambre, c’était en fait assez sombre. Je vivais à la campagne en Allemagne, donc c’était difficile de trouver la musique que je voulais écouter – il n’y avait pas internet. J’essayais donc de composer ce que je voulais entendre dans ma chambre et que je ne trouvais pas en dehors des émissions de radio que j’enregistrais avec des morceaux de Tuxedomoon, de The Cure… Et d’autres trucs dont je ne me souviens plus parce que je n’ai plus les cassettes ! Mais en gros, on appellerait ça aujourd’hui de la musique eighties. Sauf qu’il ne s’agit pas vraiment d’une référence pour moi, je n’ai pas voulu faire un album de new wave. J’ai plutôt voulu, inconsciemment, écrire un disque que j’aurais écouté et aimé produire à 15 ans, selon le souvenir que j’ai de cette époque. Du coup, le résultat est un peu différent, et il y a de l’humour dedans, ce n’est pas un album déprimant !
C’est un one-shot ou il y aura peut-être d’autres albums ?
Je veux que cela devienne mon projet principal. Peut-être que je reviendrais en solo, il ne faut jamais dire jamais, mais pour l’instant j’ai envie de me concentrer sur ce groupe avec les Desdemonas.
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Bon, vous l’aurez compris, Matias Aguayo a bien envie de faire durer le suspens quant à son nouveau projet : impossible d’en partager un enregistrement avant les concerts. Mais il nous offre en indice une petite playlist de son cru, histoire de se préparer les oreilles en attendant le 16 avril – la billeterie est juste ici.
Matias Aguayo & The Desdemonas seront également au Printemps de Bourges le 14 avril, à La Péniche (Lille) le 18 et à L’Autre Canal (Nancy) le 19.