MaMA festival 2019 : Vers le futur et au-delà
Pour la dixième année consécutive, le MaMA festival s’inscrit comme une pierre angulaire de la scène musicale en France. Installé dans le quartier nocturne le plus emblématique de Paris, ce marathon en musique de trois jours est devenu une étape incontournable pour les professionnels de la musique.
Rien qu’en repensant à ces trois jours endiablés, on a mal aux pieds. De la Cigale à la Machine du Moulin Rouge, du Carmen à la Boule Noire, en passant par le Backstage By The Mill ; Pigalle n’a plus aucun secret pour les festivaliers du MaMA. Pensé comme une véritable course dans les hauteurs des 9ème et 18ème arrondissements, le festival met à l’épreuve quiconque espère venir et se la couler douce. Sportif tu seras, si tu veux affronter le MaMA. 175 artistes programmés dans 16 salles différentes : autant dire que les aficionados du comptoir sont d’entrée disqualifiés.
Le périple démarre le mercredi 16 octobre, pour une soirée placée sous le signe de la nouvelle scène pop française. Gare à la déprime, car pour ces nouveaux artistes, la musique est le champ du doute, de la mélancolie, voire de la rage brute. Au Bus Palladium, c’est Hervé qui nous chante avec une voix déchirée les malheurs de son « Coeur poids plume » sans pour autant mettre un terme à ses sauts frénétiques. Au fond du gouffre, encore de l’espoir ? On le confesse et on l’assume : on y croit encore. Surtout face à Silly Boy Blue dont les sombres mélodies sont teintées d’une clarté un peu floue grâce à sa voie éthérée. Plus tard dans la nuit, au Carmen (cette salle minuscule à la décoration baroque) c’est Oh Mu qui séduit avec une formule similaire. Derrière son regard félin sublimé par un eye-liner de compétition, la chanteuse révèle une certaine brutalité qui n’est pas sans rappeler les meilleures heures de Bagarre. C’est d’ailleurs sur la même scène que, le lendemain, Corps assène ses textes à la fois crus, violents et presque dépressifs. « J’espère que vous êtes aigris et déprimés, parce que nous, on est pires. » lance son chanteur en début de concert. Le ton est donné.
Musique de science-fiction
Au MaMA, la musique de demain est synonyme d’une énergie brute, presque violente. La scène du futur, quant à elle, n’existe même plus. La preuve dans l’antre mythique de la Cigale. Pour le troisième et dernier soir du festival, celle-ci est sens dessus-dessous pour ne faire plus qu’un avec son public. C’est donc au milieu de la fosse que s’installe le producteur français Molécule pour un live à 360°. Quasiment plongée dans le noir, la foule n’a plus d’autre choix que de se rabattre sur le reste de ses sens pour savourer au maximum le spectacle. Et quel spectacle ! Pendant une heure entière, impossible de quitter la salle : hypnotisés, on l’est assurément face aux tours de magie du producteur. Un live qui viendrait presque éclipser celui de Maud Geffray, au même endroit. Celle qui mêle musique électronique et hommage à Philip Glass dans son album Still Life, sorti le jour même, plonge la salle dans une atmosphère quasi-religieuse. Derrière ses platines, la DJ à la veste holographique est accompagnée de la harpiste Lavinia Meijer pour un live 100% féminin à la fois doux et puissant. Mention spécial au morceau éponyme « Still Life » qui contient à lui seule toute la beauté de la performance.
La femme est l’avenir de l’homme (mais surtout de la musique)
Louis Aragon avait raison, le MaMA décide de le prouver une nouvelle fois. Si les artistes féminines ne sont pas majoritaires au sein de la programmation (40 % cette année), force est de constater que ce sont celles qui marquent le plus durablement notre esprit. Citons à titre d’exemple la voix de velours de Sarah de Mauvais Oeil qui ensorcelle le Backstage By The Mill ou bien la pop adolescente 100 % assumée d’Alice et Moi (qui apparaît comme une sorte d’Alizée 2.0 complètement décomplexée). Pour clôturer l’ultime soirée du festival, ce sont Lala &Ce et La Chica qui font l’unanimité au Backstage. Tandis que la première, nouvel espoir de la scène rap, est accueillie par des pogos en série, la seconde fait face à un public assagi pour un live aux inspirations croisées, de Belleville à Buenos Aires. Mais celle qui remporte incontestablement le titre de reine, c’est bien Pongo, qui réussit à rendre la Cigale hystérique jeudi soir. Aidée de deux danseurs, la nouvelle star du kuduro, dont le look pailleté semble tout droit sorti d’un remake disco de Star Wars, fait chanter la foule à la fois en portugais comme en kimbudu (un dialecte angolais) dès les premiers morceaux, et ira jusqu’à l’embarquer sur scène à ses côtés pour un final bouillant. Chapeau l’artiste.