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Queens of the Stone Age au Main Square Festival, 6 juillet 2018. ©J. Pouille
10 juillet 2018

Main Square Festival : Coupe du monde de l’éclectisme

par Simon Brazeilles

Ah, Live Nation, cette multinationale du spectacle qui envahit peu à peu le paysage des festivals français… En tête, le Download Festival importé du Royaume-Uni en 2016, Lollapalooza Paris débutant bientôt sa deuxième édition et le tout nouveau Paris Summer Jam prévu pour fin août, en même temps que Rock En Seine. Comme par hasard. Cependant, le mastodonte avait déjà commencé son travail à Arras en rachetant le Main Square Festival en 2010.

Dès lors, le festival est déplacé de la Grand’Place à la Citadelle d’Arras, inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco. Chaque année, grâce à un budget et des partenariats impressionnants, le groupe s’offre les plus grandes têtes d’affiche du moment. En arrivant sur les lieux, on s’attend donc à en prendre plein les yeux, à l’image de la Tour Eiffel de cinq mètres de haut plantée au beau milieu de Lollapalooza Paris. Mais ici, le lieu ne permet pas de s’étendre sur des kilomètres. A la place, deux scènes séparées par une dizaine de mètres d’herbe, une poignée de food trucks et de bars, quelques animations en haut des remparts et c’est à peu près tout. Au final, sous un grand soleil, le cadre fait très intimiste, et c’est sûrement mieux comme ça. On a même droit à des guirlandes lumineuses accrochées aux arbres.

Oscar and the Wolf au Main Square Festival, 7 juillet 2018. Crédit photo : J. Pouille

Vu le monde présent vendredi après-midi, on se demandait vraiment si on ne s’était pas trompé d’endroit. Coupe du monde oblige, le match France-Uruguay a eu raison des premiers groupes programmés. Aux alentours de 18h30, PVRIS peine à rassembler du monde. Le public ne réagit presque pas face au mélange pop-rock du trio américain, entraînant sa chanteuse dans une répétition incessante et pénible de « Jump » et « Let me see your hands up ». On verra plus de gens scander fraîchement « On est en demi » que de gens sauter ou lever les bras. Face à cette victoire, les drapeaux français prennent possession des lieux, sur les joues et sur les t-shirts tout au long du week-end.

Les Belges créent toutefois la surprise par leur présence étonnante et immanquable. On retiendra notamment l’amusant show de Roméo Elvis, en plein match Belgique-Brésil. Arborant fièrement un maillot belge, le rappeur tient les festivaliers au courant du score de son pays. Avec sa queue de crocodile, il change les paroles pour des « 2-0 pour la Belgique » et ses nombreux compatriotes présents dans la foule ne cachent pas leur engouement. Le samedi, comme à chaque concert du chanteur en France (et dans le reste du monde), de nombreux supporters belges ont fait le déplacement pour acclamer la star côté flamand Oscar and the Wolf. Malheureusement programmé entre les têtes d’affiche du jour Liam Gallagher et Depeche Mode, Max Colombie de son vrai nom se produit devant un public peu nombreux mais très réceptif à sa pop-électro sensuelle. Le lendemain, entre deux titres de pop (un peu trop) douce, Girls in Hawaii évoque le match imminent entre la France et la Belgique : « Mardi, ça va être tendu ! Nous, personnellement, on est sûr de gagner » forçant un « Allez les Bleus » général.

Paul Kalkbrenner au Main Square Festival, 6 juillet 2018. Crédit photo : J. Pouille

Tout juste vainqueur face à la Suède, le Royaume-Uni s’impose comme leader du samedi, et de loin. En voyant tous les t-shirts à l’effigie de Depeche Mode (et deux maillots Gallagher) dès le début de l’après-midi, la Main Stage ressemble plutôt à un concert du groupe et ses premières parties. Du rock, du rock et du rock : après Courteneers, Wolf Alice vient défendre son deuxième album Visions Of A Life sorti en septembre dernier. Malheureusement, sûrement à cause de la chaleur, le quatuor est bien moins énergique en live. Toutefois, référence au foot obligée : le groupe inscrit un sobre « It’s Coming Home », titre de l’hymne anglais, sur une de ses basses. Moins subtil, alors que l’horloge de la chapelle affiche 20 heures, Liam Gallagher débute son concert en passant le chant des supporters de Manchester City. Toujours aussi nonchalant, le seul être sur terre à porter une parka sous 30 degrés enchaîne les tubes d’Oasis, de « Supersonic » au fédérateur « Wonderwall », chanté jusqu’aux portes de la Citadelle. Habitude continuée juste après pour le concert de Depeche Mode, moment le plus attendu du week-end. « Personal Jesus », « Enjoy The Silence » jusqu’au final « Just Can’t Get Enough » : pendant 1h40, les tubes sont repris en choeurs par les dizaines de milliers de festivaliers. On entendra encore « Just Can’t Get Enough » chantonné dans le centre-ville plusieurs heures après la fin du show. Honnêtement, on aura tout de même préféré Queens Of The Stone Age, la tête d’affiche de la veille. Mené par le somptueux Josh Homme, le groupe de rock américain a délivré un concert maîtrisé de A à Z. Une vraie claque !

Si l’éclectisme du festival arrageois a l’avantage que chacun trouve chaussure à son pied, la difficulté à réunir se ressent vite. Au milieu des fans arborant fièrement des maillots de foot à l’effigie de Paul Kalkbrenner, la techno de l’Allemand et son remix surprenant de « Te Quiero » de Stromae ont du mal à faire danser les férus des Landais Gojira, qui avait donné quelques heures avant un vrai show à l’américaine, feu, confettis et étincelles compris. Le résultat donne des fosses peu remplies ou qui se vident au bout d’une poignée de titres, dû à l’enchaînement des concerts sur les deux scènes uniques.

The Blaze au Main Square Festival, 7 juillet 2018. Crédit photo : J. Pouille

Ce melting-pot de générations, de nationalités et de genres doit bien prendre fin un jour. En clôturant le festival, Orelsan a les mots parfaits : « La Fête est finie ». Peut-être aurait-on préféré terminer sur le show de lumières impressionnant de Justice programmé à la scène Greenroom juste avant. Si impressionnant qu’Orelsan a dû attendre la fin pour monter sur scène. Quoique le mieux aurait été le générique de fin de concert sur les écrans de The Blaze mais si on s’écoutait, on voudrait faire l’expérience du voyage cinématographique des deux Parisiens tous les jours.

Au milieu de tous ces drapeaux, on aura tout de même une pensée pour l’agitateur de drapeau jamaïcain pendant le concert de Damian « Jr. Gong » Marley et pour ces gens encore à la recherche de l’unique point d’eau potable du site.

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