La bouse du mois : M83 – Junk
Extrait du numéro 91 de Tsugi (avril 2016)
C’était mieux avant ! Cette phrase atroce s’applique pourtant à merveille au nouvel album de M83, titré Junk (camelote en anglais) comme un aveu. Ce journal a beaucoup aimé les premiers albums de ce qui était à l’époque un duo, réinventant avec talent le shoegazing et l’ambient. Par ailleurs, personne ne songe à reprocher à Anthony Gonzales, qui préside dorénavant seul aux destinées de M83, de vouloir explorer d’autres univers plus pop. Un virage amorcé depuis un certain temps déjà. Ceci dit, sortir un disque pareil, ce n’est pas un virage, ni même un revirement, c’est carrément nier tout ce qu’on a pu être par le passé et la culture indé qui vous a porté.
À Tsugi, on aime la pop, mais écouter Junk est une épreuve qu’on ne souhaite pas à ses pires ennemis, à condition qu’ils s’intéressent un minimum à la musique. Tout ici dégouline : les synthés, les saxos, les guitares, la guimauve… La croisière s’amuse rencontre le générique de Dallas sur les Champs-Élysées de Michel Drucker. Au-delà de l’épineuse question du bon ou du mauvais goût, il y a des limites qu’on n’a pas envie de franchir. Les mots manquent pour décrire une soupe comme “Moon Crystal” ou “For The Kids”. Franchement, à ce niveau-là autant écouter Céline Dion, c’est plus marrant. On est de plus en plus effaré au fur et à mesure que les pistes défilent. Bien sûr, il se trouve quelques morceaux (et encore on est sympas) pour cacher la misère, “Solitude” ou “Go” éventuellement, mais l’ensemble, interminable, serait risible s’il n’était aussi pénible (“Atlantique Sud” ? pitié !). On sent pourtant bien qu’il ne s’agit ni d’un pastiche, ni d’un calcul, mais d’un disque tout à fait sincère. M83 aime la musique qu’il fait aujourd’hui et il se trouvera certainement des gens pour l’aimer aussi. Tant mieux pour lui, mais pas ici en tout cas. (Alexis Bernier)
Junk (Naïve), sorti le 8 avril.