« King’s Mouth » : on écoute l’incroyable album concept de The Flaming Lips
Un peu de créativité ne fait jamais de mal. Dans le vaste paysage du rock indé, il est souvent facile d’embrasser les mêmes sonorités et thématiques ; toujours agréables, mais plutôt lassantes. C’est le cas des guitares immuablement plongées dans deux bains de reverb, ou au contraire décharnées et lofi à la Mac DeMarco ; les éternelles mélodies de synthés mystérieux ou les harmonies planantes. Tous ces éléments créent l’esthétique unique de cette musique, lui donnant des codes, des saveurs et des couleurs qui lui sont propres. Mais à force de poncer ses outils, ils s’éliment : les guitares se noient dans les effets et finissent par se ressembler, mystérieux devient ennuyeux et planant devient plat.
Un écueil dans lequel les Flaming Lips ont pu parfois tomber, usant la recette psychédélique qui les avait menés au succès à la toute fin des années 90. Le charme qui avait fait de The Soft Bulletin ou Yoshimi Battles The Pink Robots des classiques du genre, était devenu assez insipide une décennie plus tard. Les Américains s’étaient alors lancés dans des expérimentations plus électroniques et instrumentales, globalement intéressantes mais assez déroutantes pour les amateurs de leurs originelles ballades rock sous psychotropes. Cette période s’est étendue jusqu’en 2017, date de sortie de leur disque Oczy Mlody. Ce dernier semble être justement l’ultime témoin d’une posture quasi schizophrénique de la part des Lips, où leurs albums expérimentaux et radicaux se mêlaient aux rééditions et compilations best-of de leurs faits d’armes passés.
King’s Mouth semble être l’album de la réconciliation. Non pas personnelle, mais artistique. Structurés autour d’un conte musical – narrant la vie d’un monarque géant – et d’illustrations aussi enfantines qu’imaginatives, ses douze titres parviennent synthétiser avec cohérence les multiples univers du groupe. En parallèle, des morceaux progressifs, comme « Sparrow » ou « Electric Fire », se permettent de nombreuses recherches sonores, passant par l’utilisation vorace de samples, des touches de percussions électroniques ou encore des nappes de synthés en cascade. Mais tout est mis au service d’une véritable histoire : le fameux psychédélisme s’intègre à des comptines améliorées (« Giant Baby »), les longs ponts instrumentaux deviennent des interludes narratifs. Sans oublier d’autres fils rouges venant parachever l’ensemble, comme le timbre britannique et le traitement rétro de la voix de Mick Jones (ex-guitariste de The Clash) ou les éparses bruits cosmiques qui revêtent subtilement chacun des titres du même vernis. Une incroyable atmosphère, une créativité à toute épreuve : The Flaming Lips signent leur grand retour.
King’s Mouth est désormais disponible sur les plateformes de streaming :
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