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2 janvier 2018

Interview : le sound-system Kraken Krew s’apprête à « foutre le bordel » à Paris

par Corentin Kieffer

Dans les années 90, des sound-systems comme les Spiral Tribe, Heretik System, Metek ou encore les Epsylonn-Otoktone organisent des soirées à travers toute l’Europe partageant un esprit libertaire, autogéré et surtout festif. Si un statu quo entoure toujours le monde de la free party quant à sa légalité, la pratique est définitivement ancrée dans les moeurs des amateurs de musiques électroniques. Le son de teuf s’exporte maintenant en club, un espace radicalement différent des hangars ou des champs où posent habituellement les sound-systems. On est allé à la rencontre du Kraken Krew, sound-system de la région d’Île-de-France, avec quelques questions à l’occasion de leur soirée à Glazart le 5 janvier prochain. Toutes les informations sont sur l’évènement Facebook.

Tsugi : Kraken Krew, c’est la réunion de plusieurs sound-systems. Pouvez-vous raconter la naissance du crew ?

Kraken Krew : Tout a commencé par un délire entre quelques membres des pH4, 3fazé, Dklé et DZ lors d’une free party organisée par Artnak, 3fazé et DZ en septembre 2012. Ces vétérans de la techno se sont mis en tête de poser une grosse façade pour les 20 ans du teknival du 1er mai. Ce fut une belle réussite…

Après quelques balbutiements (free party du 14 juillet et une soirée en club à l’Underground de Rouen), mais surtout deux belles free parties (Super Mario et Adams Family) avec nos amis du sud, les Mental Resistance et Tribu K-Tare, l’idée a germé d’offrir une revanche parisienne en entrepôt pour Halloween. Nous nous sommes alors alliés au collectif des Insoumis, qui font du très bon travail, le 31 octobre 2015 et la Rave On The Dead est née. Cet événement a fait beaucoup dans l’unité du Krew, et depuis il a gagné en notoriété et l’organisation de fêtes est devenue régulière.

Pourquoi avoir décidé de vous réunir ?

D’abord l’envie de continuer à foutre le bordel. Comme on disait, c’est l’élan lancé par les derniers mohicans de ces quatre crews qui a fait la base du collectif. Les vingt ans du 1er mai étaient une date hautement symbolique. Cette belle première expérience a donné des idées pour la suite. Certains membres d’autres crew comme les Nawak, Artnak, Frenetek, 1korekt ou bien encore NSM ont rapidement intégré cette coalition.

Soyons francs, aucun de ces crews pris un par un n’aurait pu assurer un tel spectacle, vu le temps et les effectifs nécessaires, sans compter les années qui passent… Finalement il y avait aussi l’envie de ne pas poser une façade quelconque. Le panel musical, les années d’expériences scéniques, en amateur comme en professionnel, ainsi qu’une envie d’organiser de jolies fêtes nous ont donné l’énergie de continuer.

Le public de club et de teuf est-il si différent selon vous ? Ou les deux milieux sont-ils poreux ?

En général, c’est sûr que ce sont deux publics très différents. Néanmoins, la musique permet de se réunir. Mais même lors de nos soirées payantes, notre public est essentiellement composé de « free parteux ». Bien-sûr il y aura toujours quelques « purs et durs » qui ne mettront jamais un pied en club. Il nous arrive de croiser également des technos kids nouvelle génération dans nos soirées payantes ou en free party.

Vous vous rattachez davantage à la scène free ou à la scène rave ?

Issus plutôt de la free, nous avons toujours été ouverts à la visite, voire à l’organisation d’une rave. Les budgets étant plus importants, les raves permettent de voir de grosses scénographies et des artistes internationaux. Alors que la scène free nous permet des collaborations passionnantes avec d’autres sound-systems. Certains d’entre nous montent faire des grosses raves et festivals hollandais depuis près de 15 ans et continuent de s’y rendre régulièrement.

Quelle est la différence entre mixer dans un hangar ou mixer dans un club ?

Il existe pas mal de différences… Déjà dans l’entrepôt tu risques tout ton matériel (enceintes, groupe électrogène, lights, platines, ordinateurs, vinyles), des sanctions judiciaires voire pénales, et donc financières. Nous sommes d’ailleurs sous le coup d’une saisie de génératrice suite à la Rave On The Dead 3.

En ce qui concerne le mix pur et dur, le hangar est sombre et sans limites de son ni de temps. Le club est a contrario plus « cadré », même s’il est toujours excitant de jouer la musique que l’on aime devant un public déchaîné, que ce soit en club ou en hangar.

En mixant en club, c’est l’occasion de défendre vos idées ou vous privilégiez l’aspect festif ?

C’est surtout l’occasion de foutre le bordel sans prendre de risques en pleine capitale ou ailleurs. Même si en finissant aux aurores, la saveur ne sera forcément pas la même.

Vous avez un avis sur la loi qui va imposer la limitation du son dans les clubs et festivals ?

Elle va enlever du plaisir aux clubbers et aux festivaliers, car quoiqu’il arrive notre musique s’écoute fort. Elle peut même passer l’envie au public d’aller en festival. Imagine les plus gros DJ réunis sur un plateau que tu écoutes en sourdine… D’autant que la limitation n’éliminera pas les problèmes d’audition : si c’est mal réglé, c’est mal réglé !

Quels sont vos meilleurs souvenirs de soirées en club ?

Le Kraken Krew n’a que quatre expériences d’organisation en club/salle (Underground, Batofar, Complexe 85, Glazart). La plus marquante reste la co-organisation de la Bass Wars en décembre 2016, avec l’association vendéenne Illusion sonore. Nous avons pris d’assaut le Complexe 85 (entre La Roche-sur-Yon et Cholet, ndr), qui n’est franchement pas une salle facile à remplir de par sa situation géographique et finalement le pari fut pleinement réussi ! 2000 personnes sur trois salles (hard music, techno et trance), 30 kW d’enceintes L-Acoustics dernier cri, du mapping, des têtes d’affiches et un public fort heureux.

Vous avez quelques morceaux récents qui vous ont percutés ces derniers temps ?

Étant donné notre nombre, tu te doutes bien que l’éventail musical va être très large !

Tracklist :
Etnik – « Celsius »
Ransomer – « Bring »
Apashe & Lektrique – « Confess »
W.LV.S (Electric Rescue & The Driver) – « Misericordia »
KRTM feat Synaptic Memories – « Let Me in »
Tyson – « Monstermoog »
Seizure – « Informer »

Vous avez des sorties de disques prévues en 2018 ?

Le label Kraken sera finalisé courant 2018, KeMi devrait y sortir un EP. Parallèlement Resh G et Konik préparent leur premier album digital sous leur nom commun Kaos Theory sur le label Oxymor. Resh G va éditer aussi en solo des vinyles : Oxymor 06, Pain-Beurre 08, Pain-Beurre HS 01 et un repressage de Pain-Beurre 03. Il y a également Thieum et Konik qui ont fait un morceau dans la compilation XMAS 2017 d’Oxymor, disponible en libre téléchargement.

Le Kraken Krew sera au Glazart le 5 janvier prochain pour une nuit techno, hardstyle et drum’n’bass. Toutes les infos sont sur l’évènement Facebook.

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