Interview croisée : Mondkopf / Perc
L’un, Anglais, est déjà bien en place dans le paysage musical local , sa vision de la musique électronique en ayant déjà fait vaciller plus d’un. L’autre, un jeune Français au destin flamboyant, nous a déjà impressionés avec deux albums splendides et des prestations live imparables. Perc et Mondkopf partageront la tête d’affiche d’une grande soirée In Paradisum, qui invite Perc Trax pour l’occasion, les deux labels ayant beaucop en commun, à commencer par l’amour de la musique sans concessions. Ils nous racontent la rencontre, à deux voix.
Quelle idées ont été développées sur le The Nicest Way EP de Mondkopf, sorti sur Perc Trax ? A-t-il été créé sur des bases différentes ?
Perc : Je vais laisser Paul (Mondkopf, ndlr) répondre…
Mondkopf : Il n’y a pas eu de différence. Ali (Perc, ndlr) m’a demandé des morceaux et il a choisi ceux qui lui ont plu pour l’EP, on a discuté ensemble du meilleur tracklisting. En général j’essaie de faire ma musique et c’est aux labels de prendre ce qui leur plait. Si aucun label extérieur n’a l’air de correspondre ou si ça complique les choses, ça rajoute des délais, je peux toujours la sortir sur In Paradisum.
Perc, tu es un producteur renommé et “installé” depuis quelques temps maintenant. Comment ressens-tu le fait de voir de jeunes talents comme Mondkopf évoluer dans un style très radical, proche du tien ?
Perc : C’est très rafraîchissant, énergisant, ça me motive à être plus exigeant avec ma propre musique, à innover et à essayer continuellement de nouvelles idées. Je me dois d’avancer, de prendre des risques. Je déteste les artistes “à formule”, et qui s’y accrochent une fois qu’ils accèdent à la popularité, quitte à décliner le même morceau encore et encore sur le même thème. Je ne voudrais en aucun cas finir comme ça.
L’univers musical que vous défendez au quotidien semble rester dans une certaine forme d’ombre… Vous considérez-vous comme des résistants, par opposition à la tiédeur actuelle du milieu indé ?
Perc : Je ne considère jamais ma musique, ou ce que je sors sur Perc Trax, comme faisant partie d’un univers musical plus grand. Il est particulièrement difficile de repérer ta position au mileu de cet univers, mais je ne pense pas que ma musique puisse être qualifiée de “résistante”. Je la fais avant tout pour moi-même, pour m’aider et me sentir mieux. Si d’autres personnes l’apprécient, cela me comble, cependant, cela n’a jamais été ma priorité d’interpeller qui que ce soit lorsque je travaille en studio. Je ne pense pas me battre contre qui que ce soit, mis à part la musique que je vois être portée aux nues alors qu’elle me semble générique.
Mondkopf : Je ne veux surtout pas porter de message avec In Paradisum. On sort la musique qui nous plait, point. Quand je fais de la musique, c’est pareil, je veux me satisfaire avant tout, je veux faire quelque chose d’honnête par rapport à ce qui me touche. Que d’autres apprécient tout ça, c’est le petit plus qui te donne la force de continuer quand les choses vont mal, mais c’est pas une fin en soi. C’est pas grave si tout ce qu’on fait reste dans l’obscurité, l’important est de ne pas se trahir.
Vous vous sentez inspirés l’un par l’autre ?
Perc : Oui. Je pense que l’imagination de Paul, et son usage des mélodies, des atmosphères, ainsi que du bruit et de la distorsion, m’inspire particulièrement, moi comme beaucoup d’autres.
Mondkopf : Définitivement. Perc m’a remis dans le bain de la techno et de la musique électronique en général quand il a sorti son album. Sa musique est sombre et brutale mais surtout personnelle, et jamais dans une agression gratuite. J’aime les partis pris, cela m’inspire, et Perc n’en est pas dénué.
À quoi peut-on s’attendre à cette soirée In Paradisium / Perc Trax ?
Monfkopf : Des fortes personnalités musicales dans l’un des meilleurs lieux pour écouter et danser sur de la techno à Paris. Tous les artistes présents ont leur manière de voir le dancefloor, ils veulent créer du plaisir tout en expérimentant. Quand à moi je vais clôturer la soirée en DJ, j’essaie vraiment de m’exprimer à chaque DJ-set que je fais comme si je faisais un live.
Perc : Un équilibre entre le dancefloor et le laboratoire sonore. Un truc expérimental, qui ne perd pas de vue le rythme et le mouvement. En ce qui me concerne, je ferai de mon mieux pour pousser mon son aussi loin que me le permet ma confiance dans le public parisien, qui sera, je l’espère, assez ouvert d’esprit pour saisir ce que je leur proposerai.
Quel est votre lien avec Andy Stott and Low Jack, qui jouent également à cette soirée ?
Perc : Je suis fan d’Andy Stott depuis un bail, et bien qu’il n’ait jamais produit pour Perc Trax, nous avons sorti un remix de Millie, qui a travaillé avec lui, et qui fait également partie de Demdike Stare et du Modern Love collective. Il est vraiment l’un des meilleurs artistes expérimentaux évoluant en Angleterre aujourd’hui. Concernant Low Jack, je le connais depuis peu, mais j’ai adoré tout ce qu’il a pu sortir jusqu’à maintenant.
Mondkopf : La prochaine sortie In Paradisum sera un split entre Low Jack et Qoso. J’adore l’univers de Low Jack, qui n’appartient qu’à lui. Il arrive à rendre sexy et moite du noise en lui injectant une vibe house/r’n’b chamanique. C’est perturbant et assez punk finalement. Pareil pour Andy Stott, il a sa patte et il l’assume, je ne le connais pas personnellement mais j’ai hâte de voir à nouveau son live sur un bon sound system !
On peut s’attendre à un EP de Perc sur In Paradisum dans le futur ?
Perc : Haha, je ne sais pas si ils voudraient de moi sur leur label, il vaudrait mieux demander à Paul et Guillaume !
Mondkopf : Ca serait avec plaisir ! On lui a déjà proposé un remix pour l’un de nos artistes. Le calendrier est chargé pour cette année avec deux, peut-être trois albums. Mais dès que ça se calme je serai ravi de lui demander !