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20 octobre 2014

Flashback : Berlin Atonal 2014 (report vidéo)

par rédaction Tsugi

Il y a presque deux mois, nous nous rendions à la deuxième édition du festival Berlin Atonal. Deuxième édition… depuis sa “résurrection” comme nous vous le racontions l’an dernier. Même lieu, la fameuse Kraftwerk de la Köpenicker Strasse, et un line-up toujours consacré aux versants les plus pointus et expérimentaux que nous offre la musique électronique, quoique plus marqué cette année par des sonorités industrielles. Ce qui, en passant, correspondait parfaitement au lieu, véritable cathédrale païenne de fer et de béton. Même si le festival se déroule à Berlin, il n’est point question ici de danser sur de la techno kilométrique à en perdre la notion du temps jusqu’à se retrouver dans un état de béatitude – pour cela, on se rendra plutôt au Berghain. Non, ici on écoute la musique sérieusement, presque religieusement, et les occasions de remuer nos guiboles se sont faites plutôt rares. Cela ne nous a pas empêcher d’apprécier, tant le festival a rassemblé la crème de la scène électronique “intelligente” mondiale.

Pour des raisons de planning nous n’avons malheureusement pas pu assister à la soirée d’ouverture qui accueillait l’orchestre “Ensemble Modern” notamment pour une interprétation de l’inusable “Music for 18 Musicians”, chef d’oeuvre, s’il en est, de la musique minimaliste américaine des années 70. C’est donc le jeudi soir que nous prenions nos marques et notre première claque avec le live de Miles Whittaker naviguant entre IDM, indus, techno et dub. Comme d’ailleurs de nombreuses performances auxquelles nous avons assisté par la suite. Puis vint sur scène le duo Sendai – composé de Peter Van Hoesen et de Yves de Mey. Contrairement à Lyon durant les Nuits Sonores, le public ici n’était pas venu par hasard, et personne ne jeta de bouteille à la figure de ces deux artistes experts d’une techno-drone vrillée et métallique. La dernière prestation de la soirée fût sans doute la plus rythmée et aussi une première mondiale. Un nouveau projet de Milton Bradley intitulé “The End of All Existence”. Une techno breakée surpuissante aux sonorités IDM et surtout très sombre, comme les splendides visuels ambiance “fin du monde “ l’accompagnant. Brillamment pessimiste serait-on tenté de dire. 

 Des sons surgissant de toute part

Enthousiasmés par cette première soirée, on arrivait beaucoup plus tôt sur les lieux des “festivités” le lendemain, dès 18h pour assister au concert exceptionnel du rare et cultissime maître de l’ambient Biosphere. Exceptionnel car la performance avait lieu sur un sound-system spécialement créé pour le festival sur une scène secondaire à la capacité limitée. On dû d’ailleurs patienter un peu avant d’accéder à la terre promise. Le public se trouvait en fait immergé dans un espace quadrillé par seize colonnes sonores qui permettaient à l’artiste de jouer dans toutes les dimensions. Ainsi les sons très contemplatifs du norvégien – qui était lui-même invisible – semblaient surgir de toute part, de gauche et de droite évidemment, mais également du plafond et sous nos pieds. Une expérience passionnante mais malheureusement trop courte, trente minutes à peine, tant pis pour les retardataires. 

Après nous être rassasiés d’une Currywurst, on assistait à un live, là aussi très contemplatif, signé Dasha Rush. Son projet Antartic Takt, très éloigné de ses productions dancefloor, était volontairement composé de nappes ambient très froides et immersives, accompagnées d’une performance visuelle du russe Licht qui nous emmenait dans des latitudes extrêmes. Après ce coup de froid, il ne fallait pas compter sur Abulla Rashim pour faire remonter la température. Derrière ce patronyme ne se cache pas un mystérieux émir du Golfe converti au groove électronique, mais un grand blond suédois, très remarqué sur la scène techno ces dernières années. S’il l’on retrouvait le côté répétitif et claustrophobique de ses maxis, son live “spécial Atonal” était par contre dépourvu de squelette rythmique se concentrant sur des boucles obsédantes et crépusculaires. De kick il ne fût pas non plus question avec le live de Donato Dozzy et Nuel. De l’ambient-techno là aussi, mais dans un registre plus industriel et atmosphérique, même si un beat discret finit par surgir sur les derniers tracks. Tout comme la veille, la soirée se concluait avec un live plus directement techno, rythmique et dansant, en l’occurrence celui du mystérieux Headless Horseman. Le bonhomme a en effet pour habitude de se produire masqué, sous une capuche et un voile lui cachant le visage. Avec une musique puissante et réveillant le public après des performances plus contemplatives, il délivra l’une des prestations les plus appréciées du festival. De quoi nous donner l’énergie nécessaire pour poursuivre la soirée dans les afters du Globus et du Tresor attenants, où l’on appréciait le live techno-dub intemporel de Scion, et diverses expériences de techno barrée notamment celles d’Adam X, SHXCXCHCXSH et Stanislav Tolkachev.

Le retour sur scène d’un mythe

Le samedi soir, après une errance dans Berlin à la recherche d’un resto – on avait trouvé porte close au Cha Chà Thai qu’on vous conseille en passant et on vous déconseille par la même le fameux White Trash Fast Food, véritable attrape-touriste – on débarque pile pour le début du live très attendu de Cabaret Voltaire. Voilà plus de 20 ans que Richard H. Kirk, qui porte désormais le projet en solo, ne s’était pas produit sous ce nom. Dès notre arrivée on pouvait constater une augmentation sensible du public par rapport aux soirs précédents et la présence de nombreux quadras et quinquas venus redécouvrir leurs premiers émois musicaux adolescents. Une foule à la hauteur du mythe et de l’apport du groupe à la musique électronique telle qu’on l’entend aujourd’hui. Le live de Cabaret Voltaire se voulait sans nostalgie et c’est donc à une performance modernisée et 100% machines  à laquelle nous assistions. L’électro-post-punk-indus des débuts se voyait réinventée et remusclée à l’aide d’adjuvants technoïde, IDM et même drum’n’bass. Le tout sous des projections visuelles angoissantes et épileptiques mêlant guerre, religion, violence, mort ou totalitarisme. Le live de FIS, entre ambiant et IDM, nous parut donc un peu fade après cette performance survoltée.

 

Le festival Berlin Atonal version 2014 s’arrêtait là pour nous cette année – voire le pire moment ci-dessous – et nous quittions les lieux avec la satisfaction d’avoir assisté à un événement d’une grande ampleur, consacré à des musiques moins conventionnelles et pourtant tout aussi passionnantes. Réussi de bout en bout, avec un public avide de découvertes, respecteux des artistes, on repensait à la salle “Automne” du Weather Festival, où l’on avait été attristé de voir tous ces gens s’éclater sur un fatras sonore d’où n’émergeait que le kick – du fait de la sonorisation calamiteuse. On aurait pu leur mettre une boite à rythme calée sur 130 BPM toute la nuit qu’ils se seraient amusés quand même. Ici c’était tout l’inverse, les gens venant avant tout pour écouter de la MUSIQUE ! Et on conseillera aussi à Pedro Winter de venir faire un tour à Atonal l’année prochaine. Il pourra y constater qu’une partie de la musique électronique a bien conservé sa “vibe expérimentale”.



Meilleur moment : Les lives à la fois énergiques et cérébraux de Milton Bradley et Headless Horseman. Le come-back scénique convainquant de Cabaret Voltaire.

Pire moment : Se rendre en after au Berghain. Y passer une bonne fin de nuit. Au moment de repartir à une heure bien avancée de la matinée, manquer de chuter dans l’escalier menant au rez-de-chaussée et se fracturer la cheville. Bilan : 4 semaines de plâtre et des douleurs encore présentes au moment de la publication de ce report.

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