Fischerspooner est de retour, sans concession : « je voulais être très clair sur le fait que cet album parle d’amour gay »
Neuf ans : une éternité sur la planète musicale d’aujourd’hui, rythmée par les sorties effrénées, les posts incessants (et calibrés) sur les réseaux sociaux et une obligation de résultat toujours plus pressante. Cette description est, bien sûr, un peu noircie. Mais après neuf ans d’absence, le duo Fischerspooner a dû se prendre ces considérations so 2018 en pleine poire. En tout cas, Warren Fischer et Casey Spooner, les deux membres de ce groupe électro-clash américain ayant fait les belles heures des années ’00 avec leurs trois premiers albums #1, Odyssey et Entertainment, n’ont pas vraiment l’air décidés à faire de concessions. Leur nouvel album Sir, attendu pour le 16 février et entièrement produit par Michael Stipe de R.E.M. (on y croise aussi le producteur BOOTS), est une collection de titres homo-érotiques électroniques, composés par Spooner et Stipe là où ils ont fait l’amour pour la première fois. C’est sûr que ça ne se vendra pas dans les rangs de la Manif’ pour tous, ou même dans les foyers tradis de leurs compatriotes américains. Mais ils s’en foutent. Alors que son nouveau single « TopBrazil » vient de s’accompagner d’un clip (une once de Depeche Mode, une tonne de corps musclés), on en a discuté par mail avec le principal intéressé, Casey Spooner.
Pourquoi avoir mis si longtemps pour sortir un nouvel album de Fischerspooner ?
J’ai pris autant de temps que nécessaire. Entre temps, j’ai créé beaucoup d’autres choses. L’industrie musical est ultra lente également : je suis prêt pour cette sortie depuis février 2016 !
Comment le décrirais-tu ?
C’est une évolution. Nous sommes restés fidèles à nos racines musicales mais Michael Stipe m’a poussé à aller plus loin en terme de songwriting et de chant.
Quelles ont été tes influences et motivations pour écrire cet album ?
J’avais juré ne jamais refaire un album. Le business musical n’a pas été très tendre avec moi. Je préfère le monde de l’art. Mais Warren (Fischer, l’autre moitié de Fischerspooner, ndr.) m’a demandé de tester quelque chose tout de même et de travailler sur une chanson. Il était clair que nous partagions encore une alchimie. Donc j’ai fait un nouvel album, parce que je crois plus en ma capacité de création qu’en ma perspicacité de businessman.
Tu as dit de cet album qu’il était « agressivement homosexuel ». Aussi, Michael Stipe et toi teniez à ce qu’il soit très clair que tu chantais à propos de relations homosexuelles, spécifiquement entre hommes. Pourquoi vouloir rendre ça évident dans les textes et les clips ?
Quand le genre n’est pas spécifié dans une chanson, personne n’imagine qu’il s’agisse d’une histoire queer. Tout le monde part du principe que c’est hétérosexuel. Donc afin de raconter correctement mon histoire je devais rendre ça très clair que cet album parle d’amour gay, entre hommes.
Tu dis préférer le monde de l’art, tu as par ailleurs déclaré t’y sentir plus libre. Tu ne te sens pas libre dans l’industrie musicale ?
Le business de la musique a beaucoup de règles, de formats, et besoins systématiques. Quand je travaille dans le monde de l’art, l’effort est bien plus centré sur la création. Tu peux y faire tout ce que tu désires. A vrai dire, c’est même encouragé. Je ne retrouve pas les mêmes encouragements et soutiens dans la musique. J’y travaille car tu peux t’y connecter avec un public plus large. C’est à peu près tout !
C’était comment de travailler avec Michael Stipe et BOOTS ?
Michael est l’un de mes plus vieux amis et mon premier amant. J’ai énormément de respect pour lui, c’est un merveilleux artiste. Il m’a guidé dans l’écriture de cet album et m’a encouragé à partager plus que jamais. Il m’a libéré en quelque sorte. Et il m’a aidé à exprimer ces nouvelles histoires queer. BOOTS est quant à lui arrivé à la toute fin d’un processus de deux ans, et a ramené une nouvelle excitation sonore dont nous avions besoin. Il a été un grand mentor et un soutien émotionnel, lui qui comprend l’industrie musicale d’aujourd’hui. J’adore son travail avec Beyoncé donc j’étais super enthousiaste à l’idée de travailler avec lui. Il a également ramené le génial Stuart White au mixage, qui a eu un très gros impact sur les six singles. Je suis chanceux d’avoir travaillé avec ces talents !
Tu écoutes quoi en ce moment ?
J’écoute Radio Nova tout le temps. J’adore faire une fête à la maison un vendredi soir et passer Radio Nova – j’habite à New York, donc le décalage horaire fait qu’on tombe sur des trucs deeps qui passent au milieu de la nuit pour vous. Aussi, je suis une reine de SoundCloud ! Voilà mes deux mixes préférés en ce moment :
Merci Casey !
Sir, sortie le 16 février sur Ultra Music.