Euro-vision : le Portugal vu par Batida
Pendant longtemps, le fado a été l’unique symbole musical du pays. Mais ces dernières années, sous l’impulsion de la musique électronique, une nouvelle scène est née. Avec comme héros des artistes souvent originaires des anciennes colonies portugaises d’Afrique, qui mixent avec talent électro-world-hip hop. À l’image de Buraka Sound Systema, qui vient malheureusement de se séparer ou, mieux encore, de Batida, d’origine angolaise et symbole de cette effervescence multiculturelle qu’il nous décrit si bien.
Comment décrirais-tu la scène musicale du Portugal ?
Elle n’est pas très étendue. Après la dernière crise économique, la plupart des salles se sont battues pour continuer à programmer des concerts de musique non commerciale. Pendant des années, les mairies ont sponsorisé les concerts, ce qui a donné du travail à beaucoup de musiciens. Les années de dictature ont eu beaucoup de conséquences sur la scène musicale. Le fait que le Portugal ait raté James Brown en est une. La révolution d’avril 1974 qui a chassé la dictature, a fait venir dans le pays beaucoup de personnes des colonies et ces émigrés ont apporté un large spectre musical, notamment du Brésil et d’Afrique. Une nouvelle génération a grandi, qui accepte avec bonheur n’importe quelle expérience musicale, depuis Kizomba jusqu’au rock indé, en passant par un simple voisin qui fait un beat incroyable. La scène portugaise est un mélange de tout ça.
Quelles sont les villes où ça bouge le plus ?
Lisbonne possède une superbe position géographique, ouverte sur l’océan atlantique au bout du Tage. Son histoire synthétise beaucoup de cultures différentes. C’est une ville amicale et pas chère, à la différence de beaucoup de villes européennes. Mais Lisbonne, c’est aussi les banlieues comme Almada, Amadora, Odivelas, Oeiras, Sintra. D’autres villes possèdent une tradition artistique et musicale indépendante comme Porto, Braga et Coimbra, où il se passe toujours quelque chose.
Quel est le morceau emblématique du Portugal ?
Antonio Variacoes – « É p’ra amanhã » (1983)
Quels sont tes derniers coups de coeur ?
Toute la génération des années 70, dont la plupart venaient d’Angola et du Cap Vert. Et Cacique 97, un groupe afrobeat.
Les endroits incontournables à visiter ?
À Lisbonne, j’éviterais les rues où les gens sont en majorité des touristes. Je me baladerais dans des petites rues pour sentir la ville. Je marcherais le long du Tage à la fin du jour. Pour les plages aux paysages sauvages, j’irais à Sintra ou Arrabida. Et si vous ne voulez pas quitter Lisbonne, prenez le bateau pour traverser la rivière. Comme ça, vous observerez la ville d’un point de vue différent.
Des bons plans pour sortir ?
J’aime les bars où le propriétaire donne l’impression que vous êtes chez vous. Il n’y a pas vraiment de culture club. La nuit c’est surtout passer son temps à se balader dans les rues. Mais il y a des petits clubs très bien comme Music Box… et n’importe quel club africain. Au Portugal, les discussions tournent la plupart du temps autour de la nourriture. Mon restaurant préféré est à Cascais, c’est A Ginginha Transmontana, qui possède une télé remplie de poissons, le propriétaire passe ses mixtapes de vieilles chansons portugaises. Son fils est le cuisinier et sa femme la serveuse. Il faut garder de la place pour la glace maison. Je me sens toujours heureux dans ce restaurant. C’est une adresse que je réserve à Tsugi.
A noter que Batida sera au festival d’Île de France le samedi 24 septembre dans le cadre de sa collaboration avec Konono n°1. Plus d’infos ici.