DJ Pone : « j’avais envie de gens, de câbles, de regards »
20 ans de carrière. Mis à part un tout début de barbe grisonnante, DJ Pone a toujours une gueule de jeune homme et l’énergie de l’insécurité qui l’habite. Au festival Art Rock, sis dans la fière cité de Saint-Brieuc en Bretagne, il s’apprête à se mettre à poil une fois encore. Avec des musiciens, certes, mais pour un projet solo, vrai, humain, qui sent la sueur. Sa première date d’une série qui l’emmènera jusqu’à la sortie d’un album, le premier à son nom. Rencontre express avec un type qui a tout fait, mais pas encore assez selon lui, à quelques heures d’un nouveau saut dans le vide qui, on peut le dire dès maintenant, s’est déroulé avec panache.
Tsugi : Effectuer ton baptême du feu live aussi loin de chez toi, ça ne te fait pas peur ?
DJ Pone : Non, et puis on ne peut pas dire que je n’ai pas quadrillé la Bretagne : entre toutes les dates avec les Svinkels, celles avec Birdy Nam Nam ou encore récemment en tant que DJ de Casseurs Flowters, je commence à connaître le public du coin. Je suis content de commencer cette nouvelle aventure ici, pas forcément sur une scène principale, de devoir faire mes preuves comme au bon vieux temps. D’ailleurs, je remercie le festival ainsi que tous les autres qui m’ont programmé ces prochains mois, sur la base d’une confiance en un projet qu’ils ne connaissaient pas.
Ce live, tu l’as voulu comment ?
Le plus humain possible. Je voulais prendre le contrepied de la plupart des lives électro avec des budgets visuels démentiels, qui misent beaucoup sur l’impact rétinien. J’avais envie de gens, de câbles, de regards. Je voulais bosser avec des « zikos », aussi, pour retrouver un côté presque punk. Mon batteur Pierre a bossé avec The Do et est à l’origine le batteur de Lofofora… Je me dis que les gens ont parfois envie de retrouver cette énergie et cette patate que tu perds parfois sur scène si tu penses trop sur la présentation. Et puis j’ai imaginé ça pour moi aussi, j’aime le live, et j’avais envie de retrouver cette proximité.
Beaucoup de lives électro actuels peinent parfois à faire tomber le « quatrième mur » à trop jouer sur la scéno…
Exactement, mais ça pose aussi la question du comment : quand on arrive à poil pour un nouveau projet sans avoir le budget d’un gros calibre de l’électro, comment faire pour arriver à remettre une pression comme on pouvait le faire à plusieurs avec Svinkels ou Birdy ? Je savais déjà que je ne voulais pas me retrouver seul avec mon ordi et des boutons. Travailler avec des musiciens et assumer le côté « joué », je crois que ça peut marcher. Et si la plupart des morceaux sont tirés de mon album à venir, ils ont tous été vitaminés pour le live.
Cet album, il est prêt ? Comment l’envie t’est venue de passer le cap de l’album solo ?
Il est en boîte, je compte le sortir à l’automne, de manière autonome. J’ai travaillé avec Superpoze à la réalisation et Boogie Vice aux mix et aux arrangements. Je fais pas partie de cette école du « tout tout seul », il y a une émulation toujours intéressante qui se crée quand tu produis des morceaux avec des gens de l’extérieur, même si ce sont les tiens. J’étais arrivé à un moment où j’étais seul aux commandes de ma carrière, avec le projet Birdy désormais derrière moi, Sarh en pause, et pour être honnête, je me voyais pas juste refaire un maxi, continuer tranquillement les DJ-sets… Il me fallait une vraie raison de retourner au turbin sur scène. Superpoze m’a énormément aidé pour peaufiner les mélodies, pour sélectionner ce qu’on garde ou pas, Boogie Vice a donné un son mortel à l’ensemble… Au final, c’est plus un album d’écoute, y’a un featuring avec Sage, un autre avec Louisahhh… Mais j’ai tenu à faire le truc dans mon studio, de le sortir moi-même, c’est vraiment mon aventure. Y’a une part de défi avec moi-même dans tout ça, certainement.
Tu te lances quand même dans le live devant un public qui, de fait, ne connaît rien de ce que tu me racontes. C’est dangereux ?
Oui et non, on se prépare au maximum en avance pour assurer le coup quand même. C’est même un truc assez cool de se dire que tu vas jouer quelque chose que les gens vont forcément appréhender comme quelque chose de nouveau, même si il y a un morceau de mon EP Erratic Impulses sorti en 2014 dans la tracklist… J’ai dévoilé quelques petites choses hier sur les réseaux sociaux, rien de plus. Non pas que je me prenne pour quelqu’un qui veut garder le mystère, mais je préfère ne rien dire de ce que je fais tant que je ne suis pas sûr de pouvoir le dire. Que ce soit pour l’annonce d’un live, d’une date de sortie… Et puis tout va beaucoup trop vite, je préfère annoncer les choses qui comptent peu de temps à l’avance pour que les gens n’oublient pas ce que tu leur racontes (rire).
Après 20 ans de carrière et des tonnes de projets, elle se trouve où, l’énergie ?
En s’entourant de personnes qui t’impressionnent, de jeunes qui te stimulent, en redescendant des marches pour mieux les grimper. Redémarrer un projet sur la scène B du festival Art Rock, c’est ça le secret.
Birdy Nam Nam, on en parle ?
C’est fini, c’est derrière moi, point barre.
La dernière fois que l’on s’est vus il y a deux ans, tu as parlé de ta passion pur la scène rock hardcore. Jamais eu envie de tenter le coup ?
Le hardcore, c’est un kif, je suis aussi fan de Madball que de Portishead. Mais je ne me verrais pas scratcher derrière un groupe de molosses qui envoient des murs de guitares. Déjà parce que j’aime les projets hybrides, mais pas forcément le côté fusion, genre « rock avec des scratches », et d’ailleurs ça a déjà été épuisé comme filon. Non, je crois que ça reste une période dans laquelle j’adore revenir et puiser de l’énergie parfois, c’est vrai que tous ces groupes ricains sont géniaux. Mais loin de moi l’idée de m’imaginer chanteur ou guitariste d’un groupe comme ça (rires).