Diggers Factory, ou quand le crowdfunding aide à presser des vinyles
Le principe est simple : Diggers Factory est une plate-forme de crowdfunding permettant à de petits producteurs de presser leurs vinyles à moindre frais. Alexis, 26 ans, a eu cette idée il y a maintenant trois ans « à force de traîner avec des potes musiciens qui galéraient à financer eux-mêmes leurs vinyles. J’ai assez vite pensé au crowdfunding qui, pour moi, est encore à ses balbutiements. Je suis convaincu que le partage, l’entraide et supprimer les intermédiaires vont changer une très grande partie de notre société. On passe directement du créateur à l’acheteur et c’est plutôt magique ! ».
Et concrètement, comment ça se passe ? Il existe plusieurs approches de Diggers Factory. D’abord, un producteur peut vouloir presser ou rééditer un vinyle. Il demande alors à ses fans de pré-commander la galette, en ayant calculé le minimum de ventes nécessaires pour lancer son projet. S’il atteint ce chiffre, Diggers Factory prend 10% de commission, lance la production et s’occupe des stocks, de l’envoie, et peut faire l’intermédiaire avec les usines de pressage, des réseaux de distribution, des disquaires, studio de mastering… Bref, tous les partenaires nécessaires à la création d’un album. « L’artiste reçoit l’argent en amont de la production. Il ne prend plus aucun risque, n’a plus besoin de gérer les stocks et peut mieux prévoir sa demande puisqu’il définit lui-même son objectif de vente. Il y a énormément d’artistes qui ont sorti des albums uniquement en version digitale ou CD. Par exemple, nous avons sorti un album de Christ., un Anglais qui travaillait avec Boards Of Canada. Il a demandé à ses fans et nous avons produit 200 vinyles d’un vieil album grâce à eux !», complète Alexis. Fini la trouille de se ruiner en voulant sortir un EP ! Si le nombre de pré-commandes désiré n’est pas atteint, tout le monde est remboursé.
Autre possibilités, les Diggers (comprendre les mélomanes habitués à la plate-forme) peuvent eux-mêmes demander un vinyle en l’ajoutant à leur « wishlist ». Album jamais réédité voire jamais pressé ? Il suffit de demander : comme pour une pétition, si le nombre de Diggers impatients de découvrir tel ou tel album en vinyle est assez grand, Diggers Factory contactera le label pour le pousser à lancer le projet. « Au lieu d’acheter un vinyle en rupture de stock à 80 euros sur internet, pourquoi ne pas réunir les fans pour le rééditer à un prix normal ? », note Alexis. Dis comme ça, forcément, ça donne des idées.
Il n’y a pas que les artistes qui peuvent produire leur vinyle sans dépenser un euro : les collectifs et autres groupes aussi. C’est le cas de la communauté PWFM – un groupe Facebook nommé Pas Weather Music Festival qui s’accompagne maintenant d’une webradio, PW.FM, pour Provocative Wave For Music. Après avoir lancé un concours au sein de leur communauté pour sélectionner six artistes, PWFM s’est rapproché de Diggers Factory pour pouvoir produire le vinyle – une face techno, une face house. « Les artistes ont proposé eux-mêmes leurs tracks sur PWFM, les auditeurs ont voté, on s’est marré à faire la pochette… Tout le monde a mis sa patte à l’édifice, et ça c’est plutôt chouette. Sur la face A, plutôt ambiant/house, on a trois jeunes artistes qui viennent d’un peu partout : Paul André (Brooklyn), P.O. (Corse) et LEOZ!NHO (France). Sur la face B, ce sont tous aussi de jeunes artistes mais qui commencent à pas mal tourner et qui suivent le courant de la techno très industrielle : YRNEH, Airod et EKLPX », explique Marion, une des fondatrices de PWFM. Le crowdfunding en est à peu près la moitié de l’objectif, à 35 jours de la fin de la campagne. Maintenant, il n’y a plus qu’à précommander… Et à presser !
Forcément, le Disquaire Day est une date importante pour des passionnés comme Diggers Factory ou PWFM. Les deux seront d’ailleurs au Bar à Bulles de la Machine du Moulin Rouge à Paris, demain toute la journée, pour présenter leurs projets respectifs bien sûr, mais pour aussi écouter du bon son avec plusieurs DJs.