🤝 Chloé : « C’est important de reconnaître les talents de la jeune génération »
On fête cette année la dixième édition du BPM Contest, le seul tremplin français consacré exclusivement aux nouveaux producteurs électroniques. Après Vitalic en 2020, c’est Chloé qui est la marraine d’un concours où l’on a vu passer et parfois triompher Tez Cadey, Les Gordon, Mila Dietrich, French 79, ou encore Irene Dresel. La réputée productrice et DJ française nous explique son rôle tout en portant un regard avisé sur la nouvelle génération.
Pourquoi avoir accepté ce rôle de marraine du BPM Contest 2021 ?
Sébastien Roch, son fondateur, me l’avait déjà plusieurs fois proposé, mais cela n’avait pas pu se faire en raison du timing qui n’était pas bon. Cette année marque les dix ans du BPM Contest et la nouvelle demande qui m’a été faite sous forme d’une lettre extrêmement élégante m’a touché. Je crois aussi qu’avec ce que l’on a vécu lors de cette année COVID, c’était bien de répondre présent et d’accepter cette jolie proposition pour soutenir les talents émergents.
C’est important ce rôle de transmission ?
Oui, très. Par exemple, à mes débuts, Sextoy qui était une grande DJ, m’a aidé. Elle m’a prise sous son aile en m’invitant à des soirées et en parlant pas mal de moi, notamment aux filles du Pulp. Je crois c’est important de reconnaître les talents de la jeune génération et de leur apporter une sorte de lumière. C’est le principe même du BPM Contest.
« Un bon producteur n’est pas obligatoirement un bon DJ et inversement. »
Comment percer lorsque l’on est un jeune producteur ?
Pendant longtemps, on a bien dissocié l’activité de producteur et celle de DJ. Aujourd’hui, tout est mélangé. Il y a beaucoup de confusion lorsque des DJ’s disent qu’ils sont en train de produire alors qu’ils font un set, ou lorsque l’on décrit comme un “live” un DJ set. Ce qui important, c’est de reconnaître la spécificité du producteur et qu’il puisse s’exprimer. Le BPM Contest permet justement de pousser les producteurs à aller plus loin. Ces nouveaux talents ont la chance de posséder aujourd’hui des outils plus accessibles pour composer de la musique électronique ou être DJ. Quand j’ai démarré, c’était avec un ordinateur Atari et des sampleurs. Il fallait investir dans des machines et quand tu débutes, tu n’as pas forcément beaucoup d’argent donc c’était compliqué. Pour revenir à ta question, depuis que j’ai lancé mon label Lumière Noire, je reçois beaucoup de maquettes. Je ne peux malheureusement pas tout écouter, mais j’essaie au maximum d’effectuer des retours constructifs en essayant de donner des petits conseils. Quand j’entends des productions, parfois je n’aime pas trop le morceau, mais je sens qu’il y a du potentiel et je reste en contact avec la personne. Cela permet de tisser des liens de transmission et je trouve cela très chouette. Évidemment, ce qui a changé par rapport à mes débuts, c’est l’explosion des réseaux sociaux, et des tutos. C’est génial, si j’avais pu bénéficier de cela à l’époque, cela m’aurait évité d’aller sans arrêt dans les boutiques pour avoir des informations pour comprendre ce qu’est le MIDI.
C’est plus facile ou plus difficile de percer par rapport à tes débuts ?
Je pense que c’est plus difficile. Même si on voit des phénomènes où un producteur cartonne avec juste un seul morceau. Il va se mettre à tourner alors qu’il ne sait pas forcément construire un live ou un DJ set. Cela conduit quand même à un certain nivellement par le bas. Je connais très bien à la fois le métier de DJ et celui de producteur, ils sont liés, mais complètement différents. Un bon producteur n’est pas obligatoirement un bon DJ et inversement.
Est-ce que pour un.e jeune artiste le challenge c’est de durer ?
Oui bien sûr, mais c’est aussi de s’amuser…
Quel regard portes-tu sur les jeunes producteurs ?
Je les trouve assez impressionnants, parce que techniquement ils sont très forts. Je suis assez bluffé par le son. Parfois ils sont meilleurs que nous à leur âge sur les techniques de mixes. Certains font même à la fois la prod, le mix et le master.
« Il faut être exigeant sur les sons. »
Quels sont les conseils que tu donnerais à cette jeune génération ?
D’être le plus singulier possible, et de s’écouter un maximum. Il faut être exigeant sur les sons. Il ne faut pas tout miser sur un mix ou un mastering parfait. Il y a la compo, mais il faut aussi se prendre la tête à se créer des bibliothèques de sons et à choisir les bons, de savoir comment les traiter pour arriver à créer une production originale. C’est pour cela qu’aujourd’hui il y a beaucoup de choses très bien, mais il y en a peu qui sortent du lot. Et quand c’est le cas, c’est parce qu’il y a une différence dans le traitement de son. Pour chaque morceau, il faut se demander comment ils vont résonner, quelle est la fréquence que l’on va mettre, quels effets de delay, de chorus, de distorsion. Il faut vraiment passer du temps là -dessus. Cela peut être chiant pour certains qui préfèrent jouer tout de suite. Mais parfois il y a des compos qui sont super, et qui sont gâchées par le choix de sons ordinaires. Enfin, je leur dirai que c’est un métier où il y a beaucoup de concurrence et peu d’élus, donc il peut être utile au moins au début d’avoir un autre job à côté.
On va terminer par ton actualité…
Le 29 octobre, je sors sur Lumière Noire Sequenza, mon album avec la percussionniste Vassilena Serafimova. J’ai aussi beaucoup de remixes pour Étienne Daho, Pier Faccini, Feu! Chatterton de prévus. Je me suis également occupé de la BO du film Arthur Rambo de Laurent Cantet qui sortira début décembre. Du reste, j’ai imaginé la musique d’un spectacle de danse et je viens de réaliser la signature sonore de France Culture. Et bien sûr, il y a les DJ sets qui reprennent comme le 24 septembre à Paris où je joue à la Menergy.