« Aretha Now » d’Aretha Franklin fête ses 50 ans : retour sur un album de légende
Et l’Histoire s’écrivit. Le 13 juin 1968 sortait l’album Aretha Now, publié chez Atlantic Records. Une grande leçon de soul sudiste livrée par une reine du genre, Ms. Aretha Franklin, qui résonne encore cinquante ans plus tard grâce à des chansons devenues classiques.
A l’époque, Aretha Now a la lourde tâche de succéder à un monument sorti seulement six mois plus tôt : Lady Soul, un monstre plébiscité par la critique mondiale, qui avait conféré à Aretha son nouveau surnom emblématique. Le jour de sa sortie, le magazine Rolling Stone dira de ce nouvel opus qu’il « marche sur une ligne très fine entre progrès et régression« . L’air de dire « Mouais bof, c’était mieux avant ». Pourtant, la Queen of soul en a gardé sous le coude. Aretha Now, ce sont dix chansons en moins d’une demi-heure, pour un concentré de soul à l’état brut.
« Think » ouvre l’album et impose le respect dès les premières mesures. Des mots directs, une voix chaude qui vous traverse et un refrain fédérateur. Cette chanson s’élève rapidement comme un hymne libertaire et féministe. Une nouvelle version, plus rapide et avec des cuivres, verra le jour douze ans plus tard pour le film The Blues Brothers. Pas le temps de respirer que voici déjà « Say A Little Prayer » : douce déclaration pour celui qui ne quitte jamais ses pensées, un refrain lumineux et des choeurs qui feraient frissonner un Marcheur Blanc.
« See Saw » (chanson signée Steve Cropper) et sa basse ultra-ronde s’inscrivent dans la lignée des grandes heures du R’n’b. Le Rythm & Blues de Louis Jordan et Ray Charles puisé dans le blues et le gospel, pas le « èrène-bi » des années 2000. Suivent quatre reprises qui prouvent son appétit pour les classiques et les saveurs de Memphis : « You Send Me » (reprise de Sam Cooke / 1957), « Hello Sunshine » (Wilson Pickett/1968), « I Take What I Want » (Sam & Dave/1966) et « Night Time Is The Right Time » (Honey Dripper/1937). Au milieu des reprises, Aretha Franklin revient aux compositions originales avec « You’re A Sweet Sweet Man », pépite croustillante aux saveurs prononcées, bien soutenue par une armée de cuivres gras. Aretha clôt l’album sur deux titres évocateurs : elle crie ses envies d’émancipation sur l’entrainant « A Change » au parfum de gospel, avant de susurrer « I Can’t See Myself Leaving You » sur un drap de piano, de trompettes et de choeurs tous plus doux les uns que les autres.
L’année de sa sortie, Aretha Now atteint la cinquième place des charts américains. Cinquante ans plus tard, il est reconnu comme un chef-d’oeuvre de la Deep Soul. Une des pierres angulaires qui ont fait d’Aretha Franklin une des icônes les plus influentes des années 1970. Alors n’hésitez pas. Redécouvrez cet opus de légende, ses arrangements et ses envolées vocales, qui pétillent toujours comme de fines bulles sur un verre de cristal : le Dom Pérignon de l’album soul.