[Vu de l’intérieur] Haïku, la mystérieuse agence qui fait vibrer la nuit parisienne
Extrait du numéro 95 de Tsugi (septembre 2016)
Retour sur l’épopée musicale et humaine d’HAïKU, la mystérieuse agence de création événementielle peace & love qui fait vibrer la nuit parisienne.
Peu de soirées parisiennes peuvent se targuer de faire venir Mano Le Tough, Recondite, Âme, KiNK, Magda, Prins Thomas ou encore Acid Pauli derrière leurs platines, à raison d’un rendez-vous par mois. Et pourtant, c’est bien le programme haut de gamme que propose HAïKU depuis déjà trois ans. À l’origine de l’agence, deux amis de longue date issus du milieu artistique qui souhaitent taire leur identité afin de mettre en avant HAïKU, et seulement ça. « Nous nous sommes liés d’amitié car nous avions le même rapport à la vie, à la gentillesse, à l’accueil des gens, des choses que l’on ne voit pas forcément en soirée », nous explique l’un des deux créateurs. « On a alors eu envie de lancer notre concept en nous inspirant de rencontres, de voyages, du cinéma, de la musique et de l’art en général et ainsi pouvoir faire nos propres choix, nos erreurs et répondre à nos envies. »
DES FORMATS INÉDITS
La première soirée estampillée HAïKU a lieu en septembre 2013 au Yoyo, le tout nouveau club du Palais de Tokyo, avec Tania Vulcano. On est alors encore loin des line-up quatre étoiles proposés par l’agence, mais une envie est déjà présente avec cette première date : envahir pour quelques heures des lieux étonnants et autres clubs tout juste sortis de l’oeuf. C’est ainsi qu’au fil du temps, HAïKU investira tour à tour l’Espace Pierre Cardin, la nef du Grand Palais, Virgo et depuis quelques semaines, le néo-club du treizième arrondissement parisien Nuits Fauves. « Nous aimons participer aux lancements de nouveaux lieux, c’est un challenge qui nous plaît. Nuits Fauves, c’est aussi une façon pour nous de tester un format inédit puisque nous organisons cela les mercredis. On essaye toujours de proposer aux artistes des lieux qui leur correspondent : la Machine du Moulin Rouge convient bien à Dixon par exemple, alors que Nuits Fauves conviendra mieux à des artistes peut-être moins populaires. »
Crédit : Clémentine Andre
Avec l’envie également de donner un aspect festif à des lieux non prévus à cet effet, HAïKU s’est associé à la tournée Lost In A Moment, initiée sous l’impulsion du label d’Âme et Dixon, Innervisions. Une belle histoire d’amitié qui aura conduit les deux à investir des endroits étonnants comme le tarmac de l’aéroport du Bourget à Paris, le Château de Vincennes (ci-dessus) ou encore le cadre féérique de Monasterio sur les hauteurs de Barcelone, faisant ainsi le bonheur de milliers de ravers : « Innervisions/Lost In A Moment est un projet qui nous correspond et avec lequel nous nous sentons à l’aise, en confiance et en cohérence. » Une association bienheureuse qui perdurera l’année prochaine, d’après les principaux intéressés. Malheureusement, si HAïKU a lancé quelques pistes en dehors du Grand Paris comme ces fêtes organisées à l’Experimental Beach Ibiza, au festival More à Venise ou encore à Calvi On The Rocks, il faudra attendre encore un peu avant de découvrir hors de la Capitale l’univers de l’agence HAïKU qui souhaite dans un premier temps « bien faire les choses à Paris ».
VIVRE L’ÉPHÉMÈRE AVEC POÉSIE
Son univers délicat et léché, HAïKU le cultive avec intelligence, jusqu’au choix de son nom qui renvoie à une forme de poésie japonaise brève visant à célébrer l’évanescence des choses. « Nous aimons croire que nos événements sont des poèmes festifs, des moments de bonheur éphémères. » Une certaine idée de la vie et de la fête qui transpire dans les visuels associés aux soirées : « Notre philosophie est celle de nos visuels réalisés par les photographes Ludovic Parisot et Gioia De Bruijn : la rose, le papillon, la boîte à musique, les allumettes, le masque… Tous représentent l’éphémère, une durée de vie courte. Au même titre que la salle d’attente, la chambre d’hôtel, la piste de décollage sont tous des instants de vie qui n’existent plus mais que l’on immortalise. Ce qui compte, c’est de voir et de vivre les choses avec poésie. » Les deux amis mettent ainsi tout en oeuvre pour que les soirées restent gravées dans l’esprit des participants, public comme artistes. « Nous sommes toujours en train de nous remettre en question ; cartonner pour cartonner, cela ne compte pas. La réussite ne passe que par la satisfaction des gens et des DJs. On accorde beaucoup d’importance à l’accueil, la patience, la convivialité, le sourire, on briefe notre staff sur tous ces points. »
Crédit : Clémentine Andre
À en croire la programmation du mois de septembre, le soufflé HAïKU n’est pas près de retomber puisque sont attendus Agents Of Time, Dorisburg, Red Axes, une première label-night tenue par Geist ainsi que les éternels KiNK, Âme, Magda, présents depuis les débuts de l’agence. « On tente de faire venir des artistes que nous adorons et en qui nous croyons. À 80 %, les artistes qui viennent sont des amis avec lesquels nous aimons passer un bon moment, des DJs avec lesquels nous travaillions bien avant la création de HAïKU. Il est important qu’ils soient contents de jouer pour nous, cela génère une énergie positive », explique l’énigmatique cofondateur. Difficile donc de croire qu’un seul artiste ne leur résiste, et pourtant : « La seule limite, c’est le budget. On refuse de dépasser un certain prix, car on aime le principe de décence. Et devoir transformer la soirée en VIP géant pour vendre des bouteilles ce n’est vraiment pas notre truc. »