3 jours d’amour, de champagne et de lives grandioses à la Magnifique Society
26.000 festivaliers ont foulé l’herbe de la Magnifique Society pour sa 5ème édition, un record. Dans le doux écrin du parc de Champagne, le festival rémois a balancé de bonnes doses d’amour rassembleur, de communion et du bon son . Entre des poids lourds qui confirment leur statut, et des pépites enthousiasmantes qui nous ont fait tomber en pâmoison.
La seule ombre qui pouvait s’inscrire au tableau de la Magnifique Society, c’était la pluie/déluge/tempête dont certains festivals (We Love Green, Nord Fiction…) ont déjà fait les frais pour cette année de reprise. Mais bonheur, le festival rémois fut -presque- épargné. Familles, bandes d’amis, très jeunes et moins jeunes : tous ont pu se retrouver, enfin ! C’est d’ailleurs le partage et la dimension familiale qui ressortent le plus de ces 3 jours de fête. On a vu des bretelles et des cannes posées au sol sur des nappes, des gangs de chemisettes, des appareils dentaires ou auditifs, et pas mal d’enfants portés sur les épaules de leurs parents. Que ce soit devant la grande scène de Central Parc pour Clara Luciani ou Laylow, devant celle de Club Trotter pour Fishbach ou Courtney Barnett, et même devant Yuksek dans la bulle du Royal Garden.
C’est l’une des grandes réussites de cette édition : installer durablement ce Royal Garden, comme une scène club à ciel ouvert et en continu, avec un son à 360°. Surtout quand les manettes sont données aux collectifs rémois Bonne nuit à demain, Lune, La Forge et Moonshiners et à un autre enfant du pays : Yuksek. C’était l’une des volontés du festival, et ce fut un succès. Autre ambition affichée mais quelque peu risquée : ramener du jazz et de la soul dans un festival d’ampleur comme le devient la Magnifique Society. Alors on s’est laissés séduire par des pépites. Comme Emma-Jean Thackrey, voix droite et trompette dans une formation quartet, c’est jazz et house à la fois, ça ressemble parfois à Hiatus Kayiote… On vous recommande vivement son titre « Venus » ! On retient les élucubrations de Badbadnotgood, qui ont ramené un vrai projecteur 8mm ramené pour leur VJing, mais aussi la soul de Black Pumas et Genesis Owusu, et la virtuosité de la légende Herbie Hancock : que ce soit au piano ou à la keytar. On peut même faire le lien avec The Smile, où Thom Yorke et Johnny Greenwood ont enchanté la grande scène à coups de rythmes syncopés. Parce que sortir du 4/4, ça fait aussi du bien.
Le rap a de nouveau eu une place de choix tout au long du week-end avec les lives de Josman et de Leys (issue de Nouvelle École sur Netflix, et venue remplacer Pip Millet au pied-levé, en n’oubliant -presque- pas ses paroles cette fois), et évidemment la performance habitée et calibrée de Benjamin Epps pour un rap « à l’ancienne » infusé à Griselda et la scène new-yorkaise. Ça pogote fort sur ses feat. avec Vladimir Cauchemar et Dinos. « Dans les médias ils disent que je suis un crack et c’est pas volé ». Amen ben. Sur la grande scène Laylow confirme son statut de nouvel homme fort, avec une assurance et une scénographie déroutantes. Et on aura longtemps attendu PNL, qui débarque avec une grosse demi-heure de retard sans excuse ni raison… Pour finalement livrer un concert fou, où le public reprend chaque titre en choeur. Les deux frères sont portés aux nues après avoir été hués. « Merci pour les regards, merci pour votre amour, croyez en vous. » Beh oui c’est agaçant, parce qu’on a du mal à leur en vouloir.
Mais ce sont aussi et surtout les artistes féminines qui ont enflammé ce week-end. Emma-Jean Thackray donc ; la rockeuse Courtney Barnett entre flegme et énergie animale -quel charisme mes aïeux !- ; Remi Wolf, sa fougue, son coffre, son attitude badgalbitch, ses vannes et ses twerks avec sa bassiste ; Fishbach et la classe toute en nonchalance des grandes dames, voix impeccable et humour ravageur qui nous font oublier un souci technique… Et enfin une doublette qu’on n’attendait pas tant, et qui nous a donné des leçons de live : Clara Luciani et Juliette Armanet.
La première pousse les potards ‘années 1970’ à fond, joue des anciens titres comme le merveilleux « Les fleurs » et évidemment « La grenade » reprise en choeur, chante « Je sais pas plaire » en comité très restreint -elle, sa guitare et ses 3 choristes-, elle apprend des chorés simples au public, joue avec lui, avant de lâcher les chevaux sur une incroyable cover de « I Feel Love » de Donna Summer, sur « La Baie » avant de finir en trombe par un « Respire encore » libérateur. Juliette Armanet livre un concert d’anthologie, envoie des vagues d’énergie dévastatrice en habits de lumière, de « Boum boum baby » à « Vertigo » en passant par « L’Indien » et le tonitruant « Le Dernier Jour du Disco ». À noter que le premier fumi’ du festival a été craqué non pas par Josman, non pas par PNL, mais bien par Juliette Armanet sur le bien-nommé « Brûler le feu ». Si elle ne remporte pas une Victoire de la musique pour cette tournée, on n’y comprendra plus rien.
Le paroxysme de la fête pendant ce week-end ? Assurément le Myd Live Band, qui a tout emporté sur son passage à coups de tubes et de productions bien énervées, le tout dans un esprit kawai qui lui colle à la peau. C’est désormais une certitude : on aime autant l’artiste et la bonhomie qu’il dégage, que ses compositions calibrées pour enflammer tous les dancefloors du monde. Un live à l’image du week-end : tout plein d’amour, de partage, de fougue libératrice après deux ans de privations. Au moment où les Black Eyed Peas quittent la scène après un live pas transcendant mais au moins fédérateur, ce week-end de la Magnifique Society se termine. Et on repense à cette communion, à l’ambiance familiale, aux ateliers-stands mignons de La Petite Society où l’on pouvait faire ses couronnes de fleurs, custom sa casquette ou ses shoes, se parer de paillettes, danser sur Just Dance, on repense aux émissions et interviews de Tsugi Radio enregistrées depuis le parc de Champagne (avec Fishbach, Catastrophe, Badbadnotgood ou avec La Forge, Rouge Congo et Genesis Owusu).
On n’oublie pas le champagne au même prix que la bière, les mignonnes cahutes pour combler la faim (qu’on soit végé ou non, sur chaque stand, et ça fait plaisir). Alors on a déjà si hâte de retrouver la prochaine édition de la Magnifique Society, festival en constante évolution, qui continuera à nous surprendre et à nous inspirer beaucoup -beaucoup- de tendresse.
Meilleur moment : on a un moment hésité entre Myd et Juliette Armanet, avant de clairement porter notre choix sur la deuxième. Quel live, quel charisme !
Pire moment : les 30-35 minutes d’attente avant le live de PNL. Mais on n’arrive pas -trop- à leur en vouloir car « la Magnifique c’est QLF », askip.