Mardi 30 juin a eu lieu une réunion avec le ministre de la Culture Franck Riester et certains représentants du monde de la nuit, pour discuter de la question qui est sur toutes les lÚvres : dans quelles conditions faut-il rouvrir les établissements festifs ? Résumé.
Le 19 juin dernier, le ministre de la Culture Franck Riester annonçait au micro de RTL qu’il allait « trĂšs bientĂŽt » rencontrer certains reprĂ©sentants du monde de la nuit. Lâobjectif ? Trouver des solutions pour « les plus pĂ©nalisĂ©s par la crise ». Ce « trĂšs bientĂŽt » s’est transformĂ© en hier, mardi 30 juin, oĂč ont Ă©tĂ© conviĂ© Ă une rĂ©union autour du ministre, des reprĂ©sentants non seulement du monde de la nuit, mais aussi de la fĂȘte diurne (comme les festivals) et de la musique Ă©lectronique : Michel Pilot comme conseiller culturel et expert des musiques Ă©lectroniques, Tommy Vaudecrane (Technopol), Samuel Raymond (FreeForm), Frantz Steinbach (Pierrots de la Nuit), Deborah Hazotte (Dream Nation Festival), le DJ François X, Gildas Rioualen (Astropolis Festival) et AurĂ©lien Dubois, prĂ©sident de la Chambre syndicale des lieux musicaux, festifs et nocturnes.
« Il Ă©tait trĂšs Ă lâĂ©coute et il y avait un vrai dialogue. Il savait de quoi on parlait. » François X
Un ministre Ă l’Ă©coute
Joint par la rĂ©daction de Tsugi, Michel Pilot nous a rappelĂ© le fil rouge qui accompagnait cette rĂ©union tout du long : « RĂ©pondre Ă la dĂ©tresse des diffĂ©rents acteurs de la fĂȘte, c’est-Ă -dire les artistes/DJs, les entrepreneurs et le public ». Selon lui, « le ministre a accueilli avec considĂ©ration et bienveillance nos propositions pour rĂ©pondre aux diffĂ©rentes situations dramatiques que notre Ă©cosystĂšme traverse », et nous a prĂ©cisĂ© au tĂ©lĂ©phone sentir le ministĂšre de la Culture prĂȘt Ă raviver la fĂȘte, « à faire en sorte que l’ensemble du monde de la nuit puisse accueillir au mieux lâensemble de ses publics et redonner du sens Ă©conomique Ă tous les acteurs-entrepreneurs qui organisent ces moments festifs ».
MĂȘme son de cloche du cĂŽtĂ© du DJ techno François X, Ă©galement autour de la table pour reprĂ©senter le corps artistes des musiques Ă©lectroniques et faire prendre conscience, entre autres sujets, de l’incomprĂ©hension actuel du statut juridique du DJ auprĂšs des instances comme la Sacem ou PĂŽle emploi : « Il Ă©tait trĂšs Ă lâĂ©coute et il y avait un vrai dialogue. Ses conseillers pratiquent la fĂȘte et disaient mĂȘme connaĂźtre mon travail en tant qu’artiste. Ils savaient de quoi on parlait. »

Astropolis, scÚne DÎme / ©Julia Allio
Vers une reconnaissance du métier de DJ
Pour François X, cette rĂ©union a servi Ă Ă©clairer le gouvernement sur le poids des musiques Ă©lectroniques qui ne devaient pas ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme un accessoire de la fĂȘte mais bien comme l’un de ses acteurs principaux, capable de gĂ©nĂ©rer des sommes colossales [416 millions dâeuros en 2017, soit 17% du marchĂ© des musiques actuelles en France, ndlr ; source : electronicmusicfactory]. « Il fallait faire comprendre que la musique Ă©lectronique est une industrie Ă part entiĂšre et que nous devions avoir des discussions autour de ça car, dans ce genre de rĂ©unions, il n’y a jamais dâartistes ou alors ils sont sous-reprĂ©sentĂ©s. Il faut que ça change. Quand jâai parlĂ© de mon mĂ©tier au ministre, il s’est rendu compte quâil y avait un manque de communication entre lâĂ©tat et les DJs », et aurait envisagĂ© un Ă©tat des lieux de ce statut en vue de la crĂ©ation d’un panel d’aides accessibles pour les DJs. Sur ce sujet, le fonds FG for DJ a Ă©tĂ© rappelĂ©.
Ă lire Ă©galement
De nouvelles précisions sur la réouverture des clubs et salles de concert
ConcrĂštement
Et cette rĂ©ouverture, concrĂštement ? Et bien le combat n’est pas terminĂ© mais la question s’est posĂ©e : « Si la dĂ©finition de la fĂȘte est sâenlacer, sâembrasser et sâenivrer, avec quel Ă©quilibre peut-on maintenir ces trois mots sans trop de contraintes ? » formulait justement Michel Pilot lors de cette rĂ©union. Car s’il est une Ă©vidence que les musiques Ă©lectroniques ne doivent pas ĂȘtre accusĂ©es de propager le virus, une autre Ă©vidence a Ă©tĂ© abordĂ©e, celle du caractĂšre impĂ©rieux de la fĂȘte, qui se fera avec ou sans l’approbation des pouvoirs publics : « Soit on tente une « ouverture progressive Ă la fĂȘte » (selon les termes du ministre lui-mĂȘme), soit nous ne sommes pas en mesure de proposer dĂšs cet Ă©tĂ© une rĂ©ouverture des Ă©tablissements et nous risquons un jeu du chat et de la souris entre les autoritĂ©s de police et la jeunesse qui va, de toute façon, vouloir faire la fĂȘte. Il faut Ă tout prix Ă©viter ce dernier chemin. »
« Si la dĂ©finition de la fĂȘte est sâenlacer, sâembrasser et sâenivrer, avec quel Ă©quilibre peut-on maintenir ces trois mots sans trop de contraintes ? » Michel Pilot
Cette rĂ©union d’hier n’Ă©tait que la premiĂšre Ă©tape d’une croisade qui terminera rĂ©sumĂ©e sur le bureau du PrĂ©sident de la RĂ©publique, et d’autres acteurs doivent encore prendre la parole sur cette question du retour Ă la fĂȘte en France. En ce moment mĂȘme a lieu une seconde rĂ©union, interministĂ©rielle cette fois, car cette dĂ©cision ne dĂ©pend pas uniquement de la Culture, mais Ă©galement de l’IntĂ©rieur, de la DĂ©fense et de la SantĂ©. Et comme le note François X : « Tant que tout le monde n’aura pas Ă©tĂ© consultĂ©, on restera dans une zone de flou qui ne permettra aucun calendrier. Et dans ce flou, personne n’a envie de prendre de responsabilitĂ©, ni les Ă©tablissements, ni le gouvernement. » Affaire Ă suivre.

François X à droite, à table avec le ministre de la Culture, à gauche / ©Michel Pilot