« Let’s Rock » : que vaut le « retour aux sources » des Black Keys ?
« Un retour aux sources ». Tout le monde n’a que ça à la bouche. Comme si reprendre les fondamentaux pour rebattre les cartes d’un jeu rouillé était nécessairement gage de raison et de qualité. Il faut dire que notre groupe évoque les racines originelles, les matières premières, la base des bases. Un duo assurant une formation musicale rachitique – batterie, chant et guitare ; dans le rock, seul Royal Blood peut se targuer d’être plus « simple, basique » en se contentant d’une section rythmique basse/batterie -, originaire d’une ville à taille humaine de l’Ohio et proposant du blues modernisé (« Toute la musique que j’aime, elle vient de là »), ça donne facilement envie de dire tous les deux albums : « ils sont revenus aux sources ». Ajoutons à cela quelques albums moyens, une absence de cinq ans et une certaine lassitude pour les gros concerts : le tableau est complet, les Black Keys sont de retour à la maison-mère.
Il est vrai que l’album se déleste d’un certain nombre de fioritures qui avaient fait la lourdeur et la fadeur de ses prédécesseurs : pas de titres surproduits gonflés aux synthétiseurs envahissants, pas de pont psychédélique où s’écoulent les plaintes de guitares, pas de basse groovy et ronflantes pour servir de tapis à des semi-tubes ensoleillés et à peu près radiophoniques. Ici, on joue du vrai blues-rock, comme l’annonce l’ouverture « Shine A Little Light » et ses grattes qui sentent bon l’Amérique. Les structures et les riffs à trois accords vont bon train ; mais on s’y ennuie vite. Le côté lisse des productions trop propres et chiadées a basculé de l’autre côté, avec un rock certes appréciable, mais souvent très classique et convenu. À vrai dire, Let’s Rock est vraiment intéressant quand il nous surprend : les belles harmonies vocales et les interludes de guitares sur « Breaking Down », la douce ballade diablement bien arrangée et composée qu’est « Sit Around And Miss You ». Mais cela n’arrive pas souvent, et on aurait peut-être finalement aimé un retour plus en fanfare.