This Is Not A Love Song 2019 : aventure pogotique en territoire « indie »
Marre de voir toujours les mêmes programmations en festival ? This Is Not A Love Song est pour vous. A Nîmes, du 30 mai au 1er juin, le festival a réuni pour sa septième édition toute la grande famille des musiques “indie”, ses classiques d’hier, et ses espoirs d’aujourd’hui. Sans la course aux headliners habituels, avec la part belle faite aux indépendants en tout genre. Alors forcément, avec ces choix du coeur, on se sent un peu comme à la maison.
Après le folk-rock expérimental d’Aldous Harding le premier soir (future PJ Harvey !) on entre directement dans le vif du sujet avec le concert de Shellac, mené par le légendaire Steve Albini. Guitares noisy, beats cadencés, concours de scream dans le public… Shellac ravive toute une époque. Le lendemain, place aux voisins indés, avec Poutre, très bon groupe de noise rock régional, que l’on écoute sous le soleil du Sud avant d’aller de se réfugier à l’ombre pour assister à la conférence de Chloé Delaume autour du sujet « indépendance et féminisme » et de son dernier livre Mes Bien chères soeurs. L’autrice insiste sur l’importance de la « sororité », la bienveillance des femmes entre elles, avant d’évoquer ensuite quelque chose qui nous intéresse directement : la tendance des journalistes à utiliser des termes qui évoquent la douceur, la délicatesse, pour qualifier les musiques faites par des femmes… Soit. Ca tombe bien, Courtney Barnett assure le prochain concert. L’occasion rêvée pour nous de nous rattraper ! Si vous la connaissiez pour son album folk Lotta Sea Lice en collaboration avec Kurt Vile, qui a joué la veille au festival, oubliez. Car ce soir, l’Australienne explose tout, elle brûle tout, elle défonce tout… (et on en passe !) avec son énorme rock bien gras et son chant rocailleux suintant la Harley Davidson et la route 66, qui par magie est (en même temps !) très mélodieux. Courtney Barnett livre le parfait équilibre entre un punk Riot Grrrl qui dissuaderait à vie tout journaliste d’appliquer systématiquement l’idée de douceur à une femme, un hard rock prompt à l’empowerment, et l’exigence mélodique propre au folk. Une magnifique inspiration pour toutes les soeurs dans le public.
Changement radical d’ambiance avec le concert suivant : le morceau “Assume Form” de James Blake résonne déjà sous la lune montante. Le contraste est frappant. Dans un registre plus electro soul, mais non moins indie, le garçon prodige se met complètement à nu, pour un live sublime, hyper-sensible et introspectif. Comme on pouvait s’y attendre.
Malheureusement, on est obligé de le laisser-là pour aller voir la fin du concert d’une autre légende : celui de Stephen Malkmus & The Jicks. Le papa de Pavement s’est un peu rangé, désormais, et livre un rock classique, mais (heureusement !) toujours un peu gauche et teinté d’auto-dérision. Avant de partir, il nous glisse le plaisir qu’il a à être ici, aux côtés de ses amis, Big Thief et Courtney Barnett. Car oui, à TINALS, beaucoup de musiciens se connaissent, s’apprécient, se respectent… La programmation mobilise de véritables scènes indie rock et pop cohérentes. Encore plusieurs preuves le lendemain : le live très réussi des Irlandais Fontaines DC rappelle celui de Fat White Family qui a eu lieu deux jours plus tôt. Le trio américain Low qui arrive sur scène ensuite a enregistré un album avec Steve Albini… Sans parler du bouquet final, avec les lives de Rendez-Vous et de Johnny Mafia. Une clôture très symbolique, avec deux figures montantes du rock français, pour un festival qui aura plus que jamais placé l’indépendance au centre de ses préoccupations.
Meilleur moment : Le passage de flambeau entre la très forte Courtney Barnett et le très délicat James Blake.
Pire moment : Arriver un jour férié à Nîmes… Quand aucun bus ne fonctionne ! Promenade prolongée dans de (très beaux) champs de coquelicots garantie.