En direct de… Superpoze @ La Maroquinerie, Paris
Soyons honnêtes, la question qui s’est immédiatement posé à l’écoute de Opening, le premier album de Superpoze, est quand même celle de sa transposition dans une configuration live. Nul besoin de remettre en question les qualités d’un des meilleurs disques de ce début d’année, mais bon, peu d’options “fais péter” dans la tracklist. Cela dit, notre interview croisée du jeune homme et de ses deux acolytes Fakear et Thylacine nous a confirmés (en admettant qu’il y avait un doute) que Gabriel Legeleux était quelqu’un qui savait où il allait, et ce live à la Maroquinerie nous l’a confirmé.
Un mot sur Sekuoia, qui ouvrait la marche : le Danois Pat Bech-Madsen et ses deux musiciens sont toujours aussi excellents en live, nos impressions de 2014 sont confirmées dès les cinq premières minutes. Ce projet doit prendre de l’ampleur maintenant, tout de suite (clin d’oeil appuyé) et si vous avez un doute, réécoutez “Evenings” jusqu’à plus soif avant de voir ce que ce morceau peut donner en live. Mettre ces mecs en première partie de Superpoze rajoute presque une difficulté au Caennais qui, évidemment, n’a pas montré l’ombre d’une faille. C’était pas si sorcier, il suffisait de concevoir une structure de live qui reprenne les principes fondateurs d’Opening : concise, sobre, aérienne, qui laisse peu de place aux mauvais flottements pour mieux accompagner ceux qu’on apprécie. Le tout est une question de mesure dans l’attitude, de maîtrise gestuelle et de travail sonore : la Maroquinerie a rarement aussi bien sonné (le poncif du clin d’oeil au boulot de l’ingé-son nous semble utile sur ce coup-là).
Challenge également pour Superpoze : pouvoir intégrer ses anciens morceaux, somme toute assez différents de ce qu’il est devenu en tant que producteur. Dur de qualifier “Unlive” ou “Overseas” (qui se paie un lifting qui augmente encore l’aspect intime du titre) de tubes hip-hop offbeat dévastateurs, malgré leur puissance assez surprenante sur scène. Mais personne ne bronche lorsque “Jaguar”, plus énergique sur le papier, est enchaînée dans la foulée. La piste a tout simplement été remaniée pour l’occase et elle ne sera pas la seule. Le meilleur exemple en la matière s’étale sur tout le dernier tiers du concert : “The Iceland Sound”, sûrement le morceau le plus connu de son répertoire, se fraie une place toute trouvée entre “Time Travel” et “Home Is Where I Am”, ses fragments de voix s’incrustant avec délicatesse, aux bons moments, pendant un “3 en 1” extrêmement juste. Cet adjectif n’est pas lâché par hasard : il peut qualifier l’ensemble de cette heure passée en compagnie d’un type qui n’en fait jamais plus ce que qui est nécessaire pour révéler la beauté de ses morceaux. À une époque comme la nôtre, c’est assez rare pour être applaudi. On rêve déjà de revivre ça avec un crépuscule de bon aloi sur un festival d’été.
Meilleur moment : Superpoze n’est pas l’homme le plus à l’aise avec un micro, et c’est ce qui rend ses remerciements mille fois plus touchants.
Pire moment : un jour, on va vraiment finir par scier ces foutus poteaux au milieu de la salle.