Interview croisée : comment Trentemoller a tué les darlings de Giana Factory
Ça bouge chez les Danois. Alors que Trentemoller, Anders de son prénom, annonce un nouvel EP pour la rentrée, Lost Rework, les filles de Giana Factory viennent de sortir leur deuxième album, Lemon Moon, produit par leur compatriote Anders. Ce week-end, les quatre copenhaguois avaient fait le trajet jusqu’à Paris pour Rock en Seine. Autour d’une bière à la vodka bien de chez eux, on a parlé de l’oreille de Trentemoller, du voyage musical de Giana Factory et de confits de canard.
Tsugi : Comment avez vous commencé à travailler ensemble ?
Giana Factory : On se connait de Copenhague. C’est une très petite ville, tu rencontres assez facilement les gens. On a les mêmes centres d’intérêts et des amis en commun. Lizbet à commencé à jouer dans le groupe d’Anders, il a fait un remixe pour nous et puis ça c’est développé à partir de là.
Anders Trentemoller : J’ai entendu leur premier morceau en live. J’ai aimé, j’ai trouvé ça catchy et très bon.
Comment s’est passé la collab’ ensuite ?
G.F : On a commencé en faisant des esquisses, et puis on est allé au studio toutes les trois pour essayer de trouver ce que serait ce nouvel album. Quand on a eu l’impression qu’on était allé aussi loin que possible, Anders est venu en studio avec nous. Et il est venu avec beaucoup d’idées !
A.T : On a travaillé sur l’ensemble. On a essayé de trouver l’élément de base et on a construit la chanson autour de ça. C’est vraiment un processus de « kill your darlings » (se débarrasser de ses tics de création, Ndlr), c’est toujours un peu dur.
G.F : C’était vraiment rafraichissant d’avoir cette nouvelle paire d’yeux quand on a vécu avec ses chansons si longtemps. Alors bien sûr, c’est un peu « kill your darlings », mais c’est ce qu’on recherchait, on voulait être plus centré sur l’album. Je crois qu’on était d’accord sur beaucoup de choses, c’était vraiment un processus intéressant, un bon ping pong. On a appris beaucoup d’astuces avec Anders. Ce sont des petites choses sur les beats mais qui élèvent vraiment la chanson à une toute autre étape. C’est tellement simple. Simple et génial.
Comment les chansons de l’album ont-elles changé sous l’influence d’Anders ?
A.T : Quand tu écris, tu es tenté de créer trop de trajectoires dans ton morceaux, des trajectoires sans issues donc qui durent trop longtemps. Même si ça marche sur un morceau, il faut penser à un ensemble de 9 ou 10 morceaux, à un album. C’est important de couper toutes ces choses qui ne sont pas importante pour la vision finale de l’album. Il faut essayer de trouver quel est l’élément, quel est le focus de chaque morceau, et des morceaux ensemble.
G.F : C’est une mise en perspective permanente entre l’individualité d’une chanson et l’album. Où cette chanson veut-elle aller, est-ce qu’elle a la même direction que toutes les autres. C’était très intéressant de se concentrer sur ça.
Quelle est l’histoire de Lemon Moon, par rapport à votre premier album, Save the Youth (2010) ?
G.F : C’est un voyage, mais aussi une transition. Peut-être est-ce pour ça que l’album s’appelle Lemon Moon. La lune change constamment, c’est la même chose quand on écrit de la musique, ce n’est pas quelque chose de statique.
Le premier album était vraiment une affirmation pour nous, on a fait la plupart du processus seules, on voulait trouver nous-même qui était Giana Factory, quelle était notre expression musicale. Dans cet album, on part dans un nouveau voyage : on se concentre plus sur l’écriture des morceaux et on laisse la production à Anders.
Anders, tu t’apprêtes à sortir un EP, Lost Reworks, qui comme son nom l’indique est un rework de ton album Lost, sorti en 2013. Pourquoi cette démarche ?
A.T : Ça a commencé quand la chanteuse suédoise Jenny Wilson m’a demandé de faire un remix de l’une des chansons de son nouvel album. On s’est dit que ça serait sympa de faire un échange. Et puis j’ai eu envie de faire ça avec d’autres artistes. Je suis allé voir Unknow, j’ai fait un remix pour lui et il a fait un remix pour moi. C’est vraiment un truc d’artiste à artiste : il n’y a pas de management, pas de label, par d’argent dans l’équation. C’est juste pour le fun.
J’ai aussi eu envie de faire mes propres prises donc j’en suis arrivé à faire quatre remixes de mes propres morceaux.
Pour moi, c’est une bonne excuse pour voir où ces morceaux peuvent aller, après les avoir joué en live tellement de fois. Je pense que ces tracks sont assez forts et qu’ils peuvent passer le test, être écoutés différemment. C’est ça que je voulais faire avec cet EP. Leur donner une nouvelle vie.
Jenny Wilson, qui t’as donc donné envie de faire ce nouvel EP, a souvent collaboré avec The Knife. Une réaction à l’annonce de leur séparation ?
A.T : Peut-être étaient-ils fatigués de faire ce qu’ils faisaient. Ils le faisaient très bien, mais si ce n’est plus marrant à faire…
G.F : C’est plutôt courageux, ils avaient beaucoup de succès. S’il veulent faire autre chose, c’est bien de dire «voilà ce qu’on peut faire, et maintenant on va faire d’autres projets ». On a hâte d’entendre la suite.
Quelle est la prochaine étape pour vous ?
A.T : On va beaucoup tourner, jouer dans beaucoup de festivals. On sera en Europe en septembre et en octobre, aux Etats-Unis en novembre pour deux semaines. Et puis après, je retourne à Copenhague, dans mon studio, et je vais travailler sur mon nouvel album.
G.F : On va continuer la tournée avec ce nouvel album. C’est maintenant que ça se passe. On veut revenir en France. Je pense que c’est le meilleur pays où jouer. La nourriture est vraiment bonne – et le public bien sûr. Le confit de canard, le comté, les rillettes… et le vin !
Le live de Trentemoller à Rock en Seine