Cinq jolies choses à retenir de la Magnifique Society de Reims
Jeune festival organisé dans le superbe Parc de Champagne à Reims, la Magnifique Society a réaffirmé ses fondamentaux pour sa deuxième édition. Une programmation musicale sans œillères, faisant la part belle aux découvertes l’après-midi avant de laisser la place à des artistes plus fédérateurs en soirée. Le public – comme le soleil après des semaines complètement pourries – a répondu présent avec près de 21 000 personnes sur trois jours : une progression de plus de 60 % par rapport à l’année dernière. De quoi satisfaire les organisateurs, La Cartonnerie et Césaré, qui avaient pris un risque en mettant fin au bien installé Elektricity pour conduire ce nouveau projet. La connexion avec le Japon y était une nouvelle fois mise en avant avec un espace dédié aux artistes nippons, la « Tokyo Space Odd« . Un lieu où s’est notamment distinguée la chanteuse Wednesday Campanella, accompagnée de ses ballons géants qui ont amusé le public rémois. Dans cet événement « Magnifique », on y a vu et entendu plein de « jolies choses ». Pour en retenir cinq.
L’âme de Serge Gainsbourg
Avec les présences de Jane Birkin et Charlotte Gainsbourg, difficile de ne pas penser à l’immense Serge. Même Etienne Daho, qui a conclu le festival dimanche soir en enchaînant ses nombreux tubes, y est allé de sa petite tirade. Et de reprendre « Comme un boomerang », morceau qu’il avait dépoussiéré en 2001 en duo avec Dany. Mais c’est Charlotte qui la première avait invoqué la mémoire paternelle en interprétant, après de nombreux morceaux de son dernier et excellent album Rest, des inoubliables : « Charlotte for ever » puis « Lemon Incest ». La prestation de Jane Birkin fut encore plus chargée en émotion. Accompagnée d’un orchestre symphonique et d’un pianiste japonais en charge de tous les réarrangements, elle nous a bouleversés par sa simplicité et sa gentillesse. Classe, tout simplement.
Le hip-hop est définitivement la nouvelle pop
Si le dimanche accueillait donc les stars de la chanson française Etienne Daho et Jane Birkin, ainsi que la nouvelle sensation Eddy de Pretto, ce fut aussi le seul jour à ne pas faire sold-out. Force est de reconnaître que les deux artistes – bon, il y avait aussi la chanteuse Jain – qui ont le plus fait se déplacer les foules sont deux rappeurs. Orelsan le vendredi, avec un gros show tournant essentiellement autour de son dernier album La fête est finie ainsi que quelques morceaux du précédent. Le public, un très discipliné jusque-là – il parait que c’est normal à Reims – se lâchait enfin. Une belle communion avec les fans, comme ce fut le cas le lendemain avec Lomepal, dans un registre plus pop et chanté. On s’amusait d’ailleurs de constater que leur public a, plus encore que les autres, cette fâcheuse tendance à filmer le concert plutôt que d’en profiter vraiment. Il faut bien que jeunesse se passe.
Le rock n’est pas mort
Là où d’autres festivals, qui ont pourtant le rock dans leur ADN, se mettent à bouder le genre pour séduire un public jeune, la Magnifique Society se refuse à abandonner les guitares amplifiées. Et c’est tant mieux. On a notamment profité du rock garage des japonais DYGL et du shoegaze/post-punk de Sons of Raphael, pour un concert très court, 20 minutes montre en main. Une attitude punk ou un répertoire pour l’instant limité? On ne connaitra pas le fin mot de l’histoire. Mais le grand moment rock’n’roll du festival restera la performance des Suédois de The Hives. Un son brut qui tâche et donne envie de pogoter – c’est d’ailleurs ce qui a fini par se passer. A la fin du show, le chanteur descend au milieu de la foule pour présenter les musiciens mais aussi certaines personnes du public. Cet instant surréaliste a d’ailleurs donné de grosses frayeurs aux agents de sécurité qui n’étaient pas préparés à ça.
50 nuances de house music
Côté électro, pas de techno cette année même si Vladimir Cauchemar a bien bastonné dans un registre mash-up à flute un peu putassier. On ne vous parlera pas non plus du show de Petit Biscuit au pays des biscuits roses -même si ça aurait fait un bon titre. La house en revanche était bien représentée, dans toute sa diversité. En mode nouvelle génération avec le live sympathique de Bicep qui, programmé en même temps qu’Etienne Daho, avait attiré tout le jeune public… En mode old-school avec le House Gospel Choir reprenant des classiques – Ultra Naté, Masters At Work, Crystal Waters – ou le français Kiddy Smile, lui aussi en mode nostalgique et danse voguing… En mode carrément disco avec l’excellent set de Motor City Drum Ensemble. Mais la sensation est venue du duo Faka, deux travestis sud-africains proposant une house à la fois expérimentale et décomplexée, sombre et sexy. Une performance faisant référence à la culture LGBT, au son original de Chicago, à l’Afrique et au punk. Une belle découverte.
« C’est où l’after ?«
Le festival se terminant vers 01h00, on n’avait pas forcément envie d’aller se coucher tout de suite. Pour l’instant, aucun after officiel n’est proposé pour un public chauffé à blanc, cette année par Vladimir Cauchemar ou MCDE. On a posé la question à Cédric Cheminaud, directeur de la Cartonnerie, la SMAC de Reims à l’origine de la Magnifique Society avec Césaré – centre national de création musicale. Il nous indique que « c’est en cours de réflexion pour les années à venir. Même si cela reste compliqué de les organiser à la Cartonnerie pour des questions de jauge et de logistique ». Du coup, on s’est rendu au Wave : un petit club qui a ouvert il y a un mois et demi à peine, le seul endroit rémois totalement dédié à la techno. On y a siroté un peu de champagne – normal à Reims – sur fond de hardtek/hardcore, ce qui créait un magnifique décalage. On a kiffé le lieu, alors on voulait en parler un peu… Voilà qui est fait.