C’est vendredi, jour des sorties de la semaine… et quelle semaine ! Au programme : un Tame Impala sous champis, les synthés modulaires de Soulwax, le rock baroque féministe de The Last Dinner Party, la techno mélodique de Kölsch, la house planante de Romain Garcia, l’ambiant intimiste de Vel, l’indie pop de Bulgarian Cartrader et le punk électronique de Droges.

The Last Dinner Party – From The Pyre

Un peu plus d’un an après leur premier album, Prelude to ecstasy, les cinq Londoniennes de The Last Dinner Party reviennent avec From the Pyre, un second disque plus sombre et ample que le précédent. 

Hormis sur la ballade poétique au piano « Sail Away », le groupe ne cède jamais au minimalisme. Riffs de guitare tranchants dans « Second Best », pont en français et accents psychédéliques dans « Rifle ». Elles signent un disque dense, luxuriant, où chaque morceau semble taillé pour la scène. 

On retient particulièrement « The Scythe », écrit par la chanteuse Agibail Morris à la suite d’un chagrin d’amour adolescent, avant d’être retravaillé des années plus tard, après une conversation avec sa sœur, en une méditation sur la mort. Plus dépouillé, mais tout aussi chargé d’émotion, « I Hold Your Anger » explore quant à lui la maternité. Difficile de ne pas relancer From The Pyre une fois le dernier morceau terminé.

Par Gil Martel

Soulwax – All systems are lying

All systems are lying porte bien son nom. Produit uniquement avec des synthés modulaires et des batteries, le nouvel album des frères Dewaele donne pourtant l’impression d’avoir été conçu avec plusieurs instruments, on croit ainsi entendre une guitare sur les morceaux “Idiots in Love” et “Hot Like Sahara” ou encore un piano sur “Distant Symphony”.

Une envie de brouiller les pistes qui s’explique par la volonté de refléter une société où la “vérité se déforme sous l’effet des filtres, des algorithmes”. Pour autant, les sensations sont, elles, bien réelles. On pense au tube “Run Free”, au psychédélique “Gimme a Reason” ou encore à l’industriel “New Earth Time”.

Une réussite de plus pour les frères gantois qui défendront leur septième album studio lors de leur prochaine tournée. Ils s’arrêteront à la salle Pleyel le 16 janvier.  

Par Cecilia Cavassoni

Kölsch – Kinema

Kölsch n’a jamais cessé d’explorer toutes les possibilités offertes par la techno mélodique. Avec Kinema, il signe un album visionnaire, destiné à accompagner son nouveau live « Kölsch and The Machine », dont la première aura lieu le 23 octobre à l’Amsterdam Dance Event.

Dès les premières mesures, on comprend l’identité sonore du projet : le DJ et producteur danois tisse dix titres où se mêlent nappes planantes, percussions organiques et textures électroniques finement ciselées dans un cocktail qui ne laisse aucun morceau de côté. 

Si la nostalgie domine souvent — celle de « Home », qui nous donne envie de rentrer à la maison, ou de « Smile », qui ressemble à une injonction à regarder le passé avec tendresse — Kölsch sait aussi produire pour les clubs. Le titre éponyme « Kinema » distille une euphorie calibrée pour les clubs, tandis que « All Week » adopte une rythmique saccadée et primitive.

Le musicien se permet même quelques audaces : baptiser un morceau « Nacht & Träume », en clin d’œil à Schubert, ou convier l’ensemble orchestral Symphony of Unity (né à Tomorrowland) sur « All That Matters ». Deux paris réussis.

Par Gil Martel

Vel – Cuddle Protocol

Avec Cuddle Protocol, Vel retourne vers l’un de ses premiers amours : l’ambient. Une prise de risque pour la DJ et productrice qui délaisse les BPM élevés et nous introduit à une expérience sensorielle unique.

Morceau après morceau, on se laisse envoûter par les textures électroniques d’It’s Mine Now, submerger par l’étreinte oppressante de « Softly Surrender » et séduire par les secrets que le murmure de sa voix nous révèle sur « It’s How I Suffocate ». Cuddle Protocol se distingue par la sincérité et la pudeur qui traversent l’ensemble du projet.

C’est une plongée intimiste dans l’univers d’une artiste transcendante, dont le premier album There is always a solution, sorti sur le label Mama Told Ya, nous avait déjà conquis, l’année dernière. À écouter !  

Par Cecilia Cavassoni

Romain Garcia – EURËKA

Voilà encore un prodige de l’électronique mélodique. Avec son premier album, EURËKA, Romain Garcia nous embarque pour un été sans fin au bord de l’océan. Les onze titres de cette bande-son estivale oscillent entre techno mélodique et deep house, formant un ensemble solaire, difficile à lâcher.

Si le lot est de qualité, quelques titres en ressortent tout de même. On pense au poétique « Regarder la nuit », en collaboration avec Pépite, qui lorgne du côté de l’electronica et de la pop urbaine, ou encore aux rythmes drum’n’bass de « Lost in Bisca ». À écouteer à fond dans un taxi, la nuit, fenêtres ouvertes. 

Par Gil Martel

Tame Impala – Deadbeat

Cinq ans après The Slow Rush, Tame Impala signe son grand retour avec Deadbeat — littéralement « bon à rien ». Un titre ironique pour un cinquième album tout sauf paresseux : Kevin Parker y explore de nouveaux territoires sonores, flirtant avec l’expérimental et l’électronique, comme s’il traduisait en musique ses errances sous psychotropes dans les roof bush australiens. 

Exit la pop psyché léchée qui a fait sa renommée : cette fois, Parker s’aventure du côté de la house et de la dance, notamment sur les irrésistibles « Ethereal Connection » et « Afterthought », et glisse même avec audace un rythme latino inattendu dans « Oblivion »

Les puristes devraient retrouver leurs repères sur « Obsolete » et « Piece of Heaven », deux morceaux où la pop caractéristique de Tame Impala reprend ses droits. Ça passe ou ça casse, en tout cas, nous, on est déroutés — certes — mais séduits. 

Par Gil Martel

Droges – Tout ça on crame

Le duo de punk électronique n’a peur de rien. Même pas de chier sur la Star Ac’ à la veille du lancement de la nouvelle édition du télé-crochet musical.

Dans leur nouvel album Tout ça on crame, Droges brûle tout au lance-flammes : les mascus, les SUV, les bourgeois, les propriétaires, mais aussi la musique (concon) consensuelle incarnée par l’émission de TF1 et… Pascal Obispo – qui n’a pourtant rien demandé.

Le duo n’oublie cependant pas de rendre hommage à ses origines ; sociales sur « Toujours en retard » ; géographiques sur « Les Vosges, la Drôme » (qu’ils répètent environ 150 fois, histoire qu’on comprenne bien (pire que des Bretons les gars). Tout ça on crame est la bande-son parfaite pour les prochaines manif’. Blagues potaches scandés sur fond de synthés, merguez supplément lacrymogène : on a déjà hâte d’y être. 

Par Cecilia Cavassoni

CRRDR – LatincoreLegend

On ne retiendra pas forcément tout à la première écoute de ce Latincore Legend. Normal pour un album long de 25 titres, construit comme une compilation des explorations sonores réalisées par le producteur colombien CRRDR depuis trois ans.

Rassurez-vous, on passe tout de même un très bon moment en compagnie de celui qui renouvelle la scène club sud-américaine à coup de “latincore”, un mélange de dance music et de musiques latines : reggaeton, guaratcha, dembow ou encore baile funk.

Le producteur n’est pas seul à la fête, puisqu’il est accompagné par de beaux noms comme Miss Bashful, Freebot, ILAMIKE, animaldistinto ou encore MJ Nebreda. Jouissif, super efficace, LatincoreLegend animera nos prochaines soirées sur le dancefloor. Parfait pour supporter ce mois d’octobre grisonnant. 

Bulgarian Cartrader – Greetings from Soulgaria 

Après avoir sorti en 2022 Motor Songs, Bulgarian Cartrader revient avec Greetings from Soulgaria. Le nouvel espoir de l’indie pop bulgare marque encore un grand coup avec cet album de 12 titres.

Guitares acidulées, refrains accrocheurs, paroles imagées tapissent l’univers de “Soulgaria », un monde imaginaire qui cherche à ressusciter l’innocence avec “Revirginize”, à réenchanter le quotidien avec “Toothpicks” ou encore à vaincre la mélancolie avec “Twenty Thousand Miles”. L’ensemble est nostalgique, délicat et intime, oscillant entre pop occidentale et sonorités balkaniques.

Un album à découvrir en live le 21 novembre prochain au POPUP du Label à Paris.